Pourquoi les prix vont flamber

La dette accumulée par les fournisseurs du voyage d’affaires pendant la pandémie explique (en partie) la forte hausse des tarifs à venir.

Une montagne de dettes ! Depuis deux ans, les principaux fournisseurs du travel auraient accru leur passif de 540 milliards de US$, soit 475 milliards d’euros ! Un chiffre délirant calculé par Mark O’Brien, un consultant anglais, ancien de BCD Travel, qui s’est fondé sur des rapports publics et financiers ainsi que sur des données issues des grandes agences de notation.

Sur ce montant, quelque 490 milliards de US$ proviennent de prêts bancaires et gouvernementaux. Par secteur, la dette mondiale nouvellement créée s’élève à 350 milliards de US$ pour les compagnies aériennes, 110 milliards pour les hôtels, 20 milliards pour les sociétés de transport terrestre et 10 milliards pour les TMC… 

Avec le « quoiqu’il en coûte », tout le monde a perdu la notion de l’argent et jongle avec les milliards comme avec des carottes. « Mais, prévient Mark O’Brien, ce chiffre est supérieur aux PIB de la Belgique et du Portugal réunis, ou à 7% de l’économie américaine ». 

Une dette qui expose dangereusement les acheteurs et les travel managers. Lors d’une présentation le 21 janvier dernier pour l’Institute of Travel Management (sorte d’équivalent britannique à l’AFTM), Mark O’Brien a déclaré que la pression à la hausse des tarifs résulterait en partie de ce qu’il a appelé « ce refinancement de l’industrie des voyages », comme l’ont rapporté les excellents sites The Company Dime et Skift.

Pour l’instant, les prix semblent rester à un niveau raisonnable par rapport à 2019 car les fournisseurs cherchent à encourager les voyageurs à revenir. Mais cela devrait changer au deuxième semestre, alerte Mark O’Brien, une fois la reprise plus soutenue, « car cette dette doit être remboursée ». Et de préciser : « Les fournisseurs devront alors récupérer leurs pertes, assurer le service de leur dette (les intérêts) et fournir des rendements significatifs à leurs investisseurs financiers. » 

Résultat : selon le consultant, les compagnies aériennes devraient augmenter leurs tarifs de 3,5 à 4,5% sur leurs principales routes par rapport aux niveaux de 2019 d’ici le troisième trimestre. Du côté des hôtels, la hausse serait de 5 à 9%. Quant aux TMC, « elles n’ont pas d’autre choix que de rafraîchir leurs modèles de tarification. » 

Et attention car de nombreux facteurs, autres que celui de la dette, vont ajouter à la pression inflationniste : la hausse du prix du carburant alimentée notamment par le conflit ukrainien, les investissements dans les carburants durables, les taxes d’aéroports, les pénuries de personnel… Dans un article du Figaro, l’expert du transport aérien Xavier Tytelman parie de son côté sur une hausse des tarifs aériens de 5%, « majoritairement du côté des compagnies traditionnelles et non des low costs (…) car leur meilleur état financier leur permet au contraire de relancer la guerre des prix. »

Bref, selon Mark O’Brien, une société qui dépensait habituellement 20 millions de US$ en voyages peut s’attendre à une augmentation comprise entre 875 000 et 1,1 million de US$, soit environ 5% au global. Acheteurs et travel managers, pour faire face à cette pression inflationniste, vous allez devoir faire preuve d’anticipation et de créativité !

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Tarifs aériens et hôteliers : à quoi s’attendre ?

Tarifs aériens et hôteliers : à quoi s’attendre ?

C’est une des grandes questions qui interroge les travel managers : à quels prix se fera la reprise hôtelière et aérienne ?

En théorie, ce n’est pas très sorcier. Pour prévoir son budget hôtel par exemple, un travel manager va multiplier les coûts unitaires (tarif moyen de l’hôtel par voyage) par le nombre d’unités que l’entreprise va acheter, soit le nombre de voyages que ses collaborateurs sont susceptibles d’effectuer. Sauf que la crise sanitaire, totalement inédite, rend les deux facteurs de la multiplication, coûts unitaires et nombre d’unités, bien compliqués à estimer comme l’expliquait récemment Business Travel News.

Qu’en est-il précisément des tarifs hôteliers ? Tripbam, fournisseur américain de technologies et d’analyse hôtelière, a révélé ses derniers chiffres dans un article de PhocusWire (Lire ici), issus des réservations de voyages d’affaires de ses 2000 clients dans le monde. En janvier dernier, le tarif moyen réservé était passé de 175 à 116 US$ par rapport à la même période l’année dernière, soit une baisse de 34%.

« Les tarifs continuent de baisser », affirme Steve Reynolds, Pdg de Tripbam. Et de s’interroger : « Y a-t-il une fin en vue ? Peut-être mais nous voyons toujours cette tendance à la baisse ».

Interrogé par Business Travel News Europe (Lire ici), Thomas Emanuel, directeur de la société de données hôtelières STR, n’hésite pas à s’engager : « Il faudra un certain nombre d’années avant que les tarifs moyens des hôtels reviennent au niveau de 2019 ».

Symptomatique de la volatilité des tarifs hôteliers : Tripbam indique que les voyageurs d’affaires réservent moins souvent le tarif fixe ou forfaitaire négocié, en baisse de 37% d’une année sur l’autre, alors que la réservation du tarif public disponible est en hausse de 46%.

Business Travel News raconte : « Compte tenu de la volatilité probable pour un certain temps encore, Clare Francis, une des travel managers de Willis Towers Watson (société britannique de conseil et de courtage en assurances), a adopté une stratégie consistant à négocier des tarifs doubles avec les hôtels : une remise sur le meilleur tarif disponible pour profiter des prix bas actuels, et un tarif fixe négocié pour servir de plafond lorsque les taux d’occupation et les prix se raffermiront à nouveau ». Evidemment, la réduction du nombre de fournisseurs aide à obtenir de telles conditions.

Tripbam alerte néanmoins les travel managers de surveiller de près leur performance en matière de LRA (last room avaibility), qui est censée garantir que l’entreprise peut réserver au tarif négocié, quel que soit le nombre de chambres disponibles.

« Ce que les travel managers oublient, c’est que les revenue managers ont la possibilité de désactiver les remises quand ils le souhaitent », explique Steve Reynolds. « À cause du Covid, ces derniers sont soumis à une plus grande pression : j’ai besoin d’augmenter le RevPAR (le revenu par chambre disponible), donc je veux vendre cette chambre à un prix aussi élevé que possible ».

Concernant les tarifs aériens, l’estimation à venir s’avère tout aussi compliquée. Cité par BTN Europe, Tim Coombs, patron du cabinet conseil Aviation Economics, est toutefois convaincu que « les compagnies low cost pratiqueront des tarifs agressifs sur les liaisons court-courriers » avant d’expliquer : « l’effondrement des voyages a été légèrement moins catastrophique pour les compagnies low cost qui ont bénéficié de meilleures réserves de liquidités et d’un accès plus facile au capital que leurs rivales traditionnelles ». En clair :  elles ont les moyens de stimuler la demande.

En revanche, sur le long-courrier, Tim Coombs pense que les tarifs pourraient s’avérer plus résistants. Selon lui, il y existe moins de concurrence et les compagnies aériennes chercheront à redresser leur bilan sans se faire une guerre suicidaire.

Comme dans l’hôtellerie, le transport aérien est clairement un marché d’acheteurs. Comme l’explique bien le cabinet Advito sur son blog (Lire ici), les compagnies aériennes ont multiplié les initiatives pour rendre leurs conditions beaucoup plus flexibles à cause de la crise sanitaire, telles l’annulation ou la modification sans frais. Sans compter les facilités offertes au voyageur selon son statut, comme les primes de fidélité. De fait, « les compagnies aériennes perdent une partie de leur pouvoir lors de la négociation des conditions contractuelles avec les entreprises clientes. Cela signifie qu’elles devront trouver de nouvelles façons créatives d’ajouter de la valeur pour les entreprises au-delà des économies ». Il va falloir se creuser les méninges…

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Gel des tarifs négociés dans l’hôtellerie : une décision contestée

Ce fut LE grand débat qui a agité ces dernières semaines le secteur du voyage d’affaires aux Etats-Unis.

Le 29 avril, la GBTA (Global Business Travel Association) annonçait par communiqué qu’elle encouragerait le report des appels d’offres hôteliers à l’année prochaine et le maintien des tarifs négociés pour 2020 en 2021. Motivée par un devoir de responsabilité à l’égard de fournisseurs durement touchés par la crise, la décision est loin cependant de faire l’unanimité comme l’a rapporté l’excellent Business Travel News.

Dans son article (LIRE ICI), la journaliste recense les arguments des opposants et ça déménage ! Louise Miller, directrice associée d’Areka Consulting pour les Amériques, s’inquiète : « quelle sera la crédibilité des programmes hôteliers dès lors que les tarifs négociés seront sans doute plus élevés que les tarifs du marché ? » et de poursuivre : « cela met le travel manager dans une mauvaise posture à l’égard des voyageurs qui vont voir dans leurs outils de réservation des tarifs plus bas que les tarifs négociés et qui vont se dire : je ne peux ni faire confiance au programme ni à la TMC. Cela envoie le mauvais message ». Et risque de faire augmenter le leakage.

Steve Reynolds, patron de Tripbam, n’y va pas par quatre chemins dans une tribune publiée aussi par BTN (LIRE ICI) : « appliquez cette décision, c’est le meilleur moyen de perdre votre job ! » Selon lui, il est impossible pour un travel manager ou un acheteur de justifier auprès de son patron que l’entreprise ne bénéficiera pas de remises pendant près de deux ans : « A quoi servez-vous ? Pourquoi êtes-vous payé » lui sera-t-il reproché. Il enfonce même le clou : « A quand remonte la dernière fois qu’un hôtel a dit à un client en difficulté : nous maintiendrons toutes vos remises, nous ne changerons rien même si votre volume baisse de 90% ? » et de conclure par un très américain : « les affaires sont les affaires ».

Ann Dery quant à elle, patronne des voyages et du MICE chez S&P Global, approuve la décision de la GBTA : « vous ne pouvez pas lancer un appel d’offres efficace s’il n’y a pas de bénéficiaire de l’autre côté ». Mais elle insiste aussi sur la capacité de l’entreprise à être flexible et à savoir profiter des tarifs dynamiques. Au final, les pros et les antis partagent une même conviction : le changement radical de priorités, à savoir l’hygiène et la sécurité, le besoin de communiquer ces informations et de les configurer dans les outils de réservations, vont à coup sûr renforcer le rôle du travel manager dans un avenir proche. En voilà une bonne nouvelle !

PACA : revivez le 1er événement de rentrée du 10.09 !

J’ai trouvé moins cher ailleurs” fait partie des phrases souvent remontées aux travel managers par les voyageurs. Il était donc important pour nos délégués régionaux d’apporter une réponse à nos adhérents. Cet afterwork était donc l’occasion pour les travel managers et fournisseurs présents d’échanger sur cette problématique à travers différents axes :

  • Est-ce-vraiment moins cher ? Compare t-on réellement les mêmes choses ?
  • Les prix sont-ils réellement différents selon les canaux de distribution ?
  • Les acteurs de la chaîne peuvent-ils s’engager sur le fait d’offrir le meilleur prix ?
  • Quelles actions de communication mettre en place dans l’entreprise pour éviter le bad buzz ?

La conclusion de ces échanges nous démontrent à nouveau que le travel manager doit faire preuve de transparence dans sa communication auprès des voyageurs tout en pilotant efficacement la gestion de la relation avec les fournisseurs pour traiter au mieux cette problématique.

La Délégation PACA remercie les adhérents présents ainsi que les fournisseurs ayant accepté l’invitation !