Faillites dans le tourisme, quelles conséquences pour le business travel ?

Ces derniers jours ont raisonné des annonces de faillites, un très désagréable sentiment a envahi le monde du tourisme… Thomas Cook, la plus ancienne agence de voyages au monde, celle qui a ouvert la voie à tant d’autres a été contrainte de cesser son activité et de se mettre en faillite. Aigle Azur et XL Airways, deux compagnies aériennes françaises ont elles aussi dû se déclarer en faillite… La rapidité de leurs chutes, l’échec d’une reprise malgré le placement en redressement judiciaire n’ont fait qu’accentuer le choc. L’incompatibilité des règles de redressement et de liquidation judiciaire avec la réalité du transport aérien expliquent l’échec d’une possible reprise.

Ces trois faillites retentissantes du leisure travel ont ébranlé la profession et appellent à la plus grande vigilance. En tant que représentante des travel managers et des acheteurs, l’AFTM s’interroge sur les conséquences que de telles faillites peuvent avoir sur le business travel. Mis à part la concomitance chronologique, des causes différentes sont à l’origine de ces échecs. Il convient de les analyser et de les comprendre pour mieux les appréhender. Leurs répercussions pourraient néanmoins être communes au B2C et au B2B. Chômage d’un grand nombre de salariés, crise de confiance de la part des clients et on le voit dès à présent, guerre ouverte entre les agences de voyages et IATA. Le business travel est bien évidemment secoué par ce qui arrive à sa branche “soeur” et lui apporte son soutien. Mais comprendre et anticiper ce qui a conduit à une telle situation permettrait d’avancer et d’espérer échapper à de tels dénouements.

Pourquoi l’aérien est-il si fragile en France ?

Ce n’est un secret pour personne et c’est bien souvent évoqué, les taxes et les charges salariales pèsent énormément dans le budget des petites compagnies aériennes, celles-ci doivent faire face à une concurrence étrangère qui ne subit pas les mêmes contraintes. Se pose alors la question de la taille critique dans ce secteur atomisé où la compétition agressive règne. 12 avions est la flotte minimale considérée pour amortir les coûts fixes d’une compagnie aérienne. Aigle Azur en possédait 10, XL Airways 5… La plupart des petites compagnies ne possèdent pas la flotte recommandée et tentent des consolidations pour l’atteindre. Ces consolidations sont complexes et n’aboutissent que rarement car elles butent sur des problèmes sociaux difficiles à surmonter. Le principal écueil porte sur la question de l’ancienneté des salariés. Les salariés de l’aérien conservent en effet leur ancienneté dans le métier, quelle que soit la compagnie pour laquelle ils travaillent. De toute évidence il est socialement compliqué d’expliquer à un salarié d’une compagnie aérienne qu’il sera supplanté par un nouvel arrivant plus ancien que lui dans le métier…

Ces faillites engendrent des conséquences très graves dont les répercussions résonneront sans doute encore de nombreux mois et dans des proportions dont il est aujourd’hui difficile de mesurer l’ampleur. Les Entreprises du Voyage (ex SNAV) demande aujourd’hui d’inscrire dans la loi LOM l’obligation pour les compagnies de disposer d’une garantie destinée aux professionnels et aux passagers en cas de défaillance. IATA reste pour l’instant silencieuse face à cette requête.

Le Club Affaires de l’IFTM que nous venons de vivre de très près a montré au grand jour la vitalité et l’innovation des acteurs du business travel. Si, en apparence, tout semble aller pour le mieux dans une industrie qui réalise un chiffre d’affaires annuel de 33 milliards d’euros sur un marché très dynamique, l’analogie avec les risques de faillites subsistent. Le marché du voyage d’affaires est lui aussi morcelé, atomisé même et la question de la taille critique de sa flotte s’applique également à lui. Tout comme les 12 appareils exigés, n’y a-t-il pas une taille critique indispensable à la survie dans le business travel ? Partant de ce postulat, quel est le besoin vital de consolidation entre les petits acteurs ? Quel est le seuil qui conduirait à un supplétif de protection contre la faillite ?

L’équation, qui n’a pu être résolue par Thomas Cook, Aigle Azur et XL Airways, est donc aussi posée aux compagnies et distributeurs du business travel : savoir dégager des bénéfices suffisants pour continuer à produire et innover, malgré des charges et des frais des fonctionnement non compressibles. C’est bien de le dire, c’est vraisemblablement plus difficile à faire.