Travel manager : un rôle plus stratégique

A la faveur du Covid, la fonction a pris de l’épaisseur et pourrait davantage s’imposer encore dans l’entreprise si le travel manager active les bons leviers. 

 Une occasion en or qui ne se présente qu’une fois par génération ! C’est ainsi que Business Travel News Europe introduit l’opportunité qui se présente aux travel managers de « devenir des super-héros de la stratégie. » Une conclusion qui s’appuie sur les échanges qui ont eu lieu lors d’ateliers organisés dernièrement (et indépendamment les uns des autres) par deux associations européennes : L’Institute of Travel Management (ITM) au Royaume-Uni et l’Association of Swiss Travel Management (ASTM).

Les deux ateliers ont évidemment insisté en préambule sur le rôle du Covid qui a permis aux travel managers « de se faire connaître davantage auprès des parties prenantes de l’entreprise », et à ces dernières de regarder désormais avec plus d’intérêt le programme voyages. 

Lotten Fowler, directrice générale de l’association suédoise des voyages d’affaires, est d’accord : « La visibilité des travel managers a augmenté de façon spectaculaire (…). Sécurité : nous devons parler au travel manager. Durabilité : nous devons parler au travel manager. L’équilibre entre vie professionnelle et vie privée : nous devons à nouveau parler au travel manager. »

L’ITM voit pour les travel managers les opportunités se déployer autour de deux axes. Le premier est une approche plus stratégique des voyages après que « de nombreux programmes de voyages ont été mesurés par le coût principalement, sans discussion sur la valeur d’un voyage et le retour sur investissement. »  Et d’ajouter : « de nombreuses entreprises peuvent encore croire que les équipes voyages sont là pour résoudre le « comment » et non le « pourquoi », or le travel manager a désormais acquis une valeur et une expertise sur la question. 

Le deuxième est l’élargissement des compétences du travel manager, au-delà de la fonction voyages. Compétences qui peuvent être utiles à d’autres au sein de l’entreprise. « Si un autre département organise des sessions de formation pour son personnel sur la gestion des conflits ou l’engagement des parties prenantes », le travel manager y a tout à fait sa place pour partager son expérience et donner des conseils. 

De son côté, l’ASTM insiste sur la nécessité pour les travel managers d’améliorer leur communication auprès des parties prenantes internes. « Il est important de faire beaucoup d’auto-marketing au sein de votre entreprise, explique Dominic Short, le président de l’association, il faut parler de la valeur que vous apportez et le répéter sans cesse. »

Selon l’ITM, de nombreuses entreprises forment aujourd’hui des groupes de travail interdisciplinaires pour s’attaquer aux grandes questions qui les agitent en ce moment, et « le travel manager doit avoir un siège dans chacun d’eux », quitte à s’imposer.

L’association britannique pointe toutefois un risque, celui d’être trop absorbé par les défis logistiques du moment (chaos aérien, pénurie de personnel dans les TMC…), trop enfermé dans l’opérationnel. « Le défi consiste à essayer de créer l’espace nécessaire pour un rôle plus stratégique. » A vous de jouer ! 

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Le jour d’après…

Beaucoup de choses ont été écrites sur cette crise sans précédent qui a touché tous les secteurs d’activité et impacté très lourdement le voyage d’affaires. Les résultats de l’enquête nationale lancée par l’AFTM en fin de période de confinement en témoignent.

Pour aller plus loin, nous avons souhaité offrir la possibilité à nos adhérents régionaux d’échanger, de partager leurs expériences, leurs ressentis, les difficultés rencontrées souvent, mais également les idées et les énergies déployées pour s’adapter, faire preuve de résilience et tracer des perspectives pour demain…

Des travel managers régionaux mobilisé pendant la crise

Les adhérents en région de l’AFTM ont donc pu partager leur expérience du confinement lors de six webinaires organisés par les différentes délégations régionales entre le 18 juin et le 3 juillet.

Tous les adhérents s’accordent à dire que les deux ou trois premières semaines du confinement consacrées à la gestion d’urgences, aux annulations et aux rapatriements ont été très intenses.

Les semaines suivantes ont très souvent été consacrées à la gestion post annulation et aux tentatives de remboursements ou d’échange des frais de billetterie et d’hôtels.

Tous les adhérents ont été concernés par le télétravail à temps plein ou à temps partiel.

Passées les premières semaines, l’activité purement travel se raréfiant voire disparaissant totalement, quelques-uns se sont retrouvés en situation de chômage partiel ou total mais pour la plupart, d’autres activités sont venues compléter le portefeuille habituel, qu’il s’agisse d’activités connexes au voyage ou parfois très éloignées telles que la gestion des notes de frais, de la facturation, de la formation, des mobilités internes (mutations, déménagements, recherche de logement…) ou de la restauration collective… Certains ont profité de cette période pour faire de la veille, travailler sur des sujets de fond ou accélérer la mise en place de projets planifiés ultérieurement tels que la dématérialisation des notes de frais, la révision de la politique voyages avec notamment intégration des volets RSE et renforcement des volets sureté, sécurité et digitalisation.

Des outils et des partenaires précieux

Le renforcement des procédures et des chaines de validation (workflows) a concerné toutes les entreprises qu’elles aient été intégrées aux SBT ou mises en place en parallèle. Si certaines lèvent progressivement ces couches supplémentaires de validation au fur et à mesure du déconfinement, d’autres envisagent de les conserver momentanément voire durablement afin de porter un regard préalable plus prégnant sur l’opportunité des déplacements, de mieux en maîtriser les coûts et donc d’améliorer sensiblement les ROI.

Les travel manager bénéficiant d’outils « travel et sûreté » souligne leur efficacité et leur grande utilité au plus fort de la crise.

L’utilisation des outils de visioconférence et de travail en mode collaboratif a explosé et les réunions virtuelles ont pris complètement le relais pour assurer le lien pendant cette période et permettre la poursuite d’activité. Les téléconférences de plus de 100 personnes ont remplacé des meetings prévus au printemps. Certaines entreprises ont « osé » pour la première fois organiser des réunions stratégiques (Conseil d’Administration) à distance, ce qui était totalement inenvisageable avant la crise, et compte tenu des gains constatés (temps, argent, efficacité), certaines pratiques initiées pendant la crise pourraient s’inscrire dans la durée…

Une reprise amorcée…

Les TM notent une reprise certaine des déplacements métropolitains depuis quelques semaines principalement en train ou en voiture, un frémissement concernant les déplacements européens et une reprise très progressive à l’international. Ils constatent l’extrême complexité d’organiser ces premiers déplacements avec des règles encore évolutives et une offre non stabilisée même s’ils saluent les efforts importants fournis par l’ensemble des acteurs de l’industrie du voyage d’affaires.

La fonction de TM fragilisée ou renforcée ?

Les TM ont fait la preuve de leur utilité et de leur capacité à se mobiliser sur leurs fonctions propres et dans leur rôle d’animation et de mobilisation des partenaires en période de crise.

Ils ont très fréquemment été intégrés aux cellules de crise ou associées aux processus décisionnels et ont ainsi renforcé le volet « sureté ».

Ils sont les garants du respect des conditions de sécurité sanitaire et rassurent les salariés amenés à se déplacer de nouveau.

Ils ont fait preuve de leur capacité à évoluer vers d’autres fonctions dont certaines pourront être maintenues et ouvrent de nouvelles perspectives notamment vers une ouverture plus marquée au Mobility Management.

Si la baisse des volumes aurait pu fragiliser la fonction, l’apport des TM pendant cette crise et leur capacité à se repositionner sur d’autres fonctions plaident pour une vision résolument optimiste…

A l’instar des webinars nationaux qui regroupent en moyenne 200 personnes, ces évènements virtuels en région ont été très appréciés et les adhérents ont exprimé le souhait de les voir perdurer au-delà de la crise en complément des traditionnels évènements régionaux.

Rendez-vous est donc pris pour organiser rapidement d’autres évènements virtuels en région en attendant de pouvoir se retrouver autour d’un verre au plus vite, avant l’automne espérons-le !

Christophe Chambon
Vice-président de l’AFTM

Reprise des voyages : le casse-tête des travel managers

Les travel managers réfléchissent à la manière dont les entreprises peuvent reprendre les voyages, cela en vaut-t-il la peine ? s’interroge le journal en ligne Skift.
Dans cet excellent papier, le journaliste se demande si les efforts des travel managers pour remettre leurs voyageurs d’affaires sur les routes se justifient tant règne la confusion sur les pays ouverts ou pas et sur les différences de protocoles sanitaires des fournisseurs. « Ils recherchent une formule magique, dit-il, en travaillant sur ce que l’on appelle communément un document de retour au voyage, qui définit les procédures d’approbation et autres processus visant à rassurer à la fois les salariés et les chefs d’entreprise ».
Pour donner une idée du niveau de détail auquel sont confrontés les travel managers, Skift s’est procuré un fameux document de « retour au voyages » d’une entreprise dont il garde le nom secret, et qui comporte les sections suivantes sur 18 pages : « Objectifs ; À propos de Covid-19 ; Sécurité des réservations de voyage ; Cotation iSOS des risques de voyage et médicaux ; Restrictions gouvernementales/immigration ; Restrictions des voyages aériens ; Considérations à l’arrivée ; Sécurité des transports terrestres ; Sécurité des hôtels ; Sécurité des bureaux ; Sécurité des événements ; Conditions pour les voyageurs ; Urgences et imprévus ; Assistance d’urgence 24/7/365 ; et Procédures de communication ». Le journaliste ajoute « qu’avant la pandémie, il aurait été risible de parler d’une liste de contrôle pré, pré, pré-voyage (a pre, pre, pre-trip checklist) mais qu’aujourd’hui c’est la réalité ». Des propos confirmés par Dan Schwartz, responsable des achats indirects pour les voyages internationaux chez Allegion : “Nous donnons aux gens des listes de pré, pré, pré-contrôle pour commencer à penser aux voyages. Ont-ils préparé un kit d’équipement de protection individuelle ? Ont-ils passé en revue toutes les informations de leur profil pour s’assurer qu’elles sont à jour ? ».
De nombreux travel managers finalisent également leur processus d’approbation préalable au voyage où, dans certains cas, seul le décideur le plus haut placé peut autoriser une réservation. « Nous intégrons la direction générale dans la première phase du retour, je m’inquiète de la rapidité », a déclaré Greg Wilczek, responsable des voyages internationaux du Crédit Suisse. De son côté, Andy Cassidy, travel manager de la société de médias AMC Networks International révèle « qu’il y aura un processus d’approbation solide, et avant cela un quiz de formation pour les voyageurs. C’est un quiz en 10 points pour bien faire comprendre que nous ne retournons pas à la normale. Une fois qu’ils ont réussi le quiz, ils peuvent réserver des voyages. Puis ensuite 4 niveaux d’approbation ». Pour l’ensemble des travel managers interrogés par le journaliste, la formation est une étape clé du retour au voyage, fruit « d’un travail avec les ressources humaines pour s’assurer que les salariés sont conscients du paysage futur ».
Certains se plaignent toutefois de la trop grande diversité des protocoles sanitaires mis en place par les fournisseurs, notamment les hôteliers. Ils insistent sur l’importance de la centralisation de ces informations et évoquent l’idée de regrouper et définir ces normes sous forme de codes simples que pourraient adopter les outils de réservation. Et ça, ce n’est pas le moindre des casse-têtes.