Réduction des voyages : les banques aussi

Réduction des voyages : les banques aussi

De plus en plus d’entreprises font publiquement part de leur intention de baisser le nombre de leurs déplacements professionnels.

Et maintenant les banques ! Après les grands cabinets de consultants et bien d’autres sociétés, des établissements financiers annoncent vouloir réduire leurs voyages d’affaires après la Covid dans un article du Financial Times du 25 avril (Lire ici).

Noel Quinn, directeur général de HSBC, a ainsi déclaré au FT « qu’il prévoyait de réduire ses propres déplacements de moitié en effectuant des voyages moins nombreux et plus longs ». Les auteurs de l’article en profitent pour rappeler que HSBC a économisé 300 millions de US$ sur ses frais de déplacement en 2020 par rapport à 2019 !

Ils révèlent aussi que la banque néerlandaise « ABN souhaite réduire ses voyages en avion de moitié par rapport à 2017 au cours des cinq prochaines années, notamment en interdisant aux banquiers de prendre l’avion entre ses bureaux européens et en les obligeant à préférer le train ».

Même chose pour le groupe bancaire britannique Lloyds qui « s’est engagé à maintenir l’élan créé pendant la pandémie en limitant les émissions de CO2 dues aux voyages d’affaires à moins de 50% des niveaux de 2019 ».

Les témoignages à l’avenant se multiplient. Andy Halford, directeur financier de Standard Chartered, dont le siège est à Londres, est moins tranché mais s’attend néanmoins à une baisse des déplacements professionnels d’un tiers après la pandémie.

Un banquier d’affaires senior dit : « Je pense que les gens ne voient plus l’intérêt de faire ce qu’ils faisaient précédemment. Prendre l’avion pour une réunion d’une heure par exemple, ces choses-là vont disparaître ». Un autre affirme que « les réunions avec les investisseurs pour faire le point, les tournées de présentation dans le monde entier, tout ceci va diminuer ».

La dimension écologique est la principale raison invoquée. FT a calculé qu’une « réduction de 50% des déplacements des quatre plus grandes banques du Royaume-Uni par rapport à 2019 permettrait d’économiser près de 120 000 tonnes d’émissions de CO2 par an ! » Sachant qu’un vol Paris/Londres émet par exemple une tonne de CO2 par passager…

Signe des temps selon FT, les compagnies aériennes commencent à se résoudre à cette disparition d’une partie des voyages d’affaires. Jeffrey Goh, le directeur général de Star Alliance, prévoit à long terme une baisse d’un tiers des déplacements professionnels. Shai Weiss, directeur général de Virgin Atlantic, l’estime pour sa part à 20%. A contre-courant, Michael O’Leary, le patron provocateur de Ryanair, a affirmé la semaine dernière que les voyages d’affaires allaient complètement se rétablir après la crise. Mais de sa part, le contraire eût été étonnant…

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Carburants durables : les entreprises accélèrent

Carburants durables : les entreprises accélèrent

Les grandes sociétés, dont les salariés voyagent, comptent jouer un rôle actif dans le développement des carburants d’aviation durables. Les initiatives se multiplient.

Les noms sont ronflants mais ils ne sont pas là pour faire de la figuration. Les directeurs des achats de Boeing, Boston Consulting Group, Deloitte, JPMorgan, Microsoft, Netflix et Salesforce ont créé le 20 avril la Sustainable Aviation Buyers Alliance (SABA) comme le rapporte le site The Company Dime (Lire ici).

Son objectif : aider l’industrie aéronautique à atteindre la neutralité carbone en développant la production de carburants d’aviation durables (Sustainable Aviation Fuels, SAF). Sa priorité : établir un système de certificats SAF sur la base de critères environnementaux solides. Un système qui permettra de vérifier et suivre les réductions d’émissions ainsi obtenues grâce à l’utilisation de ces SAF. « Les entreprises et leurs voyageurs d’affaires pourront ainsi poursuivre plus facilement leurs objectifs climatiques ambitieux » affirme la SABA.

Rappelons que les SAF promettent de réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’aviation de 80% par rapport au carburant fossile. Fabriqués à partir d’huiles végétales, de cuisson, de graisses animales…, ils peuvent être mélangés à 50% avec le kérosène fossile et ne nécessitent pas de changer les moteurs. Mais ils coûtent quatre fois plus chers que le carburant fossile. Résultat : ils pèsent 0,1% des 360 milliards de litres de carburant utilisés par l’aviation en 2019.

Pas le choix : pour réduire le prix, il faut que la demande augmente et que la production s’accélère. La seule bonne volonté de l’industrie aéronautique ne suffit pas, il faut que les entreprises clientes s’impliquent dans le développement des SAF. Les partenariats entre compagnies aériennes et entreprises se multiplient : United, Delta, KLM et d’autres ont annoncé récemment la création de leurs programmes SAF dans lesquels sont engagés de nombreuses sociétés. Daniel Tallos, travel manager de Nike pour la région EMEA, expliquait récemment à Business Travel News la nécessité de « conduire le changement par le biais de partenariats avec d’autres entreprises. L’action collective est un élément clé ».

La création de la SABA est une avancée supplémentaire. Elle espère avancer suffisamment sur le sujet de la certification afin de l’ouvrir à une large adhésion pour la COP26 de novembre prochain. Une fois les certificats SAF créés, il faudra pouvoir les stocker dans un registre. Pour ce faire, la SABA a prévenu qu’elle s’appuiera sur la technologie blockchain. Tout devrait être prêt pour la fin 2022. Les certificats donneront ainsi aux entreprises un instrument normalisé pour investir dans les SAF et suivre les réductions d’émissions qui en résultent… sans avoir à acheter et à garantir la livraison de ces carburants à une compagnie spécifique. C’est en somme la naissance du marché du crédit SAF. Et on n’a pas fini d’en parler.

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Forfait mobilités durables : peut mieux faire

Forfait mobilités durables : peut mieux faire

Un an après l’entrée en vigueur du forfait mobilités durables, un premier bilan mitigé vient d’être rendu public.

Le forfait mobilités durables (FMD) « doit encore entrer dans les mœurs » selon Les Echos au lendemain d’une enquête réalisée pour le ministère des Transports (Lire ici). Ce premier baromètre du FMD (Lire ici) fait apparaître que 20% des entreprises auraient déployé ce dispositif et que 11% l’auraient validé avant de le mettre en place au second semestre.

Parmi les entreprises qui ont mis en œuvre le FMD, 93 % l’ont ouvert au moins au vélo (mécanique ou électrique), 53 % au covoiturage, 45 % aux titres de transport en commun hors abonnements, 41 % aux engins de micromobilité en libre-service, 31 % à l’autopartage et 7% à la marche à pied et à la trottinette personnelle. Au global, seules 16,6% de ces entreprises ont ouvert le dispositif à l’ensemble des modes éligibles.

Autre chiffre intéressant dévoilé par ce premier baromètre : le plafond moyen mis en place par les entreprises atteint environ 400 euros, soit 33 euros par mois. Mais 25% d’entre elles proposent un montant supérieur. Rappelons que le FMD est en effet une incitation financière : les entreprises qui y souscrivent s’engagent à verser jusqu’à 500 euros par an et par employés à ceux qui choisissent la mobilité douce pour se rendre à leur travail.

Parmi les principaux freins à l’adoption du FMD, les entreprises interrogées dans l’enquête citent l’enveloppe budgétaire à allouer (35 %), un projet jugé non prioritaire par la direction (32 %) ainsi qu’un manque d’utilité perçu (22 %).

Les entreprises, notamment celles implantées en Ile-de-France, regrettent aussi que le FMD ne soit pas cumulable avec les abonnements pour le transport en commun. Or, si ce cumul était facilité, cela pourrait inciter davantage d’employés à laisser plus souvent leur voiture au garage.

En conclusion, ce premier baromètre juge que le dispositif reste encore mal connu. Or l’enjeu est de taille : Les Echos rappellent que « le secteur du transport représente environ 30 % des émissions de gaz à effet de serre dans l’Hexagone. Or, avant le début de la crise du Covid-19, sept Français sur dix utilisaient la voiture pour se rendre sur leur lieu de travail, selon les données de l’Insee ».

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Edito mensuel de Michel Dieleman : Aérien et CO2, faisons le point !

Des mouvements écologiques se montrent très virulents contre l’avion. Je vous propose ici de prendre un peu de recul sur le débat actuel et de voir la situation dans sa globalité.

Vous avez sans doute entendu parler du flygskam, ce mot suédois que l’on traduit par “la honte de voler”. Lancé en avril dernier par 250 personnalités suédoises du cinéma, celui-ci fait des émules et est rejoint par de plus en plus de suédois. Les personnes qui adhèrent à ce mouvement s’engagent, pour des raisons écologiques, à ne plus prendre l’avion. Ce serment révèle un mouvement plus vaste qui tend à pointer du doigt toute l’industrie aérienne comme étant une grande source de pollution, notamment à cause des rejets de Co2 dans l’atmosphère. Prenons un peu de hauteur et faisons le point.

En 2016, selon CITEPA, l’aérien représentait 0,8 % des émissions françaises de gaz à effet de serre alors que les voitures en représentent 16 %. À lui seul, ce chiffre devrait faire taire tous les détracteurs de l’avion. Il faut néanmoins le contrebalancer par le nombre d’utilisateurs de chacun de ces modes de transports : en France, toujours en 2016, 79,1% de la population utilisait une voiture particulière et seulement 1,5% le transport aérien. A capacité de transport égal, l’avion pollue donc 2,5 fois plus que la voiture…

Forts de ces chiffres et face à une volonté farouche de mettre en avant la pollution du transport aérien largement supérieure à celle du train (60 fois plus selon CITEPA), plusieurs députés français proposent la possibilité de fermer certains aéroports et de supprimer des vols internes lorsque des alternatives raisonnables existent par le train. Le bulletin statistique du trafic aérien commercial révèle qu’en 2018, 26,8 millions de passagers ont été transportés entre deux villes de métropoles dont 26,6 au sein des 149 liaisons principales. Sachant que la majorité de ces vols pourraient être remplacés par des trajets en train de moins de 5 heures, cela révèle une utilisation excessive de l’avion en France. Le gouvernement se refuse néanmoins de passer par une interdiction et les annonces se multiplient, créant une cacophonie d’où il est compliqué de savoir quoi penser ni comment se positionner.

Le transport aérien est un incroyable vecteur de lien, d’ouverture et d’échanges pour les citoyens du monde. En agissant de façon responsable, nous répondons aux attentes de nos clients, de nos salariés, de toutes nos parties prenantes.

Benjamin Smith, DG d’Air France KLM.

Face à toutes ces attaques, l’industrie aérienne se défend et utilise de solides arguments pour plaider sa cause. Elle est par exemple le seul secteur à avoir pris un engagement global qui ne concerne pas seulement sa consommation de kérosène mais l’ensemble de l’industrie. Elles se sont ainsi engagées à neutraliser leurs émissions de Co2 à partir de 2020 puis à les diminuer de moitié d’ici à 2050 par rapport à 2005. Alexandre Juniac, le directeur général de IATA dénonce les gouvernements qui taxent de façon punitive mais ne soutiennent pas la recherche mise en œuvre par les compagnies.

Pour limiter leur impact environnemental, les compagnies aériennes optent pour des technologies innovantes, une optimisation des opérations aériennes, une évolution des infrastructures, la création et l’utilisation de carburants durables, une implication de tous les collaborateurs et une compensation carbone qui passe par des taxes via les EU-ETS mais aussi par des programmes de reforestations et des actions RSE.

Pour exemple, et cette compagnie n’est pas la seule à œuvrer en ce sens, Air France travaille ainsi pour proposer des alternatives durables à ses voyageurs. La société se place dans une ambition de performance globale et de contribution aux objectifs de développement durable mondiaux. Ce programme passe par trois axes : limiter et compenser ses émissions de Co2, réduire, recycler et valoriser ses déchets et modérer l’empreinte sonore de ses activités. En suivant cette philosophie, Air France a réduit en 2018 de 21,6 % ses émissions de Co2 par rapport à 2011.

En résumé, Il est important de prendre aussi en compte dans le calcul de l’empreinte écologique d’un trajet, le poids des infrastructures, pas seulement le trajet en lui-même. Selon les trajets, l’avion ne sera alors pas toujours le moyen de transport le plus polluant.

Quelques chiffres pour se détendre après ces réflexions, ô combien sérieuses !

  • Les sites de streaming génèrent plus de Co2 que l’industrie aérienne !
  • 1 kg de boeuf provenant du Brésil génère autant de Co2 qu’un vol Paris > Athènes !
  • Si les 4 milliards de passagers annuels réduisent leurs bagages de 100 g chacun, 1000 vols Paris > Bombay seront économisés !

Michel Dieleman,

Président de l’AFTM