Comment conduire des appels d’offres dans ce contexte instable ? 


 

C’est un sujet très attendu auquel s’est attelé l’AFTM dans son webinar du 17 décembre dernier. Six intervenants ont répondu aux questions de l’animateur François-Xavier Izenic : Antoine Delesalle, directeur des ventes d’American Express GBT, Emmanuel Ebray, directeur général Europe de l’Ouest de HRS, Guillaume Ridolfi, directeur du business development chez SAP Concur, Christophe Roth, directeur des missions business travel au sein du groupe Epsa, Jacques de Villeplée, directeur commercial de Sixt, et Bertrand Lacotte, directeur des achats indirects Groupe chez Capgemini, et membre du comité de développement de l’AFTM.

Pourquoi mener aujourd’hui un appel d’offres ? 

Bertrand Lacotte : « La vie se poursuit et, en dépit de la crise du Covid, on doit continuer à faire notre métier d’acheteurs. Il faut donc maintenir et renforcer la relation avec les fournisseurs pour savoir où ils en sont, pour connaitre l’état du marché et ses perspectives. Dans cette idée, on a réalisé un appel d’offres hôtels car on a des contrats annuels et on a besoin d’avoir des prix pour 2021. Mais au-delà des prix, on veut être dans une logique du voyager moins mais mieux, avec notamment la réduction de notre empreinte carbone. Cet appel d’offres est donc davantage un axe de discussion avec les fournisseurs pour savoir ce que l’on fait ensemble dans les 12 mois qui viennent. » 

Christophe Roth : « Les fournisseurs accueillent favorablement les appels d’offres car c’est la continuité de la relation, l’occasion de se mettre à jour sur un certain nombre de sujets. »

Antoine Delesalle : « Les entreprises s’inquiètent de la santé financière du fournisseur : « je vais m’engager sur trois ans, mais est-ce que dans six mois ou un an, vous serez toujours là ? » On a donc plutôt des discussions constructives aujourd’hui pour savoir quelles sont nos contraintes, nos perspectives et les enjeux. C’est une recherche de compréhension des partenaires. » 

Guillaume Ridolfi : « La question de la santé financière du fournisseur est en effet devenue centrale : « comment vous inscrivez-vous dans un partenariat de longue durée ? » Mais aussi des questions sur l’éco-système avec lequel on travaille, est-il solide, fiable et s’inscrit-il lui-même dans la durée. »

Emmanuel Ebray : « Quand on est contact avec ces acheteurs, en France ou à l’international et quelle que soit la taille de leur programme, il y a de l’incertitude sur les mois à venir mais il y a la volonté de maîtriser ce qui est maitrisable : les protocoles sanitaires, les coûts, mais aussi avoir plus de flexibilité dans la négociation. » 

Jacques de Villeplée : « On a été consulté par des entreprises qui sont engagées sur plusieurs années avec des concurrents. Ils sont venus nous voir en disant : « on a une crainte sur la solidité financière de notre partenaire, sur sa capacité à fournir la même qualité de services, donc on vous consulte pour savoir si vous êtes capable de compléter l’offre de services que nous avons pour nos collaborateurs. » Ce n’est donc pas un appel d’offres en tant que tel avec un cahier des charges bien précis, mais l’expression d’un besoin précis qui demande un accompagnement. »  

L’appel d’offres sert-il néanmoins à négocier de meilleurs tarifs ?

Bertrand Lacotte : « A de rares exceptions, tous les marchés penchent en faveur des acheteurs mais une économie significative a déjà été réalisée par la baisse drastique des volumes, ce ne sont donc pas les prix qui font aujourd’hui l’amélioration des coûts de l’entreprise. Négocier les meilleurs prix du monde appliqués à un volume faible voire nul, ça ne changerait rien. » 

Christophe Roth : « C’est clairement un marché d’acheteurs, et la baisse de la demande a un impact sur les prix. Sur l’hôtellerie, on a une baisse du tarif moyen de 20%, ce qui est conséquent. Sur l’aérien aussi, on voit une baisse des tarifs. Concernant les agences de voyages, là aussi on voit la nécessité de compenser des pertes de volumes, on observe donc beaucoup de compétitivité dans les appels d’offres menés depuis le mois de mars. Oui, il y a des opportunités financières, on ne va pas se le cacher. »

Malgré le manque de visibilité, peut-on s’engager sur des volumes ?

Christophe Roth : « En moyenne sur l’année 2020, l’activité se situe entre 25 et 30% de celle de 2019. La reprise se profile au plus tôt au deuxième semestre 2021, avec des niveaux de 40 à 50%. Et le retour aux volumes historiques ne devrait pas arriver avant 2023. Sur la base de ces chiffres, les clients veulent de moins en moins s’engager sur des volumes et du côté des fournisseurs, on veut de moins en moins s’engager sur des économies. La clé, c’est de s’engager sur du long terme car la reprise sera là à long terme. »

Bertrand Lacotte : « D’une manière générale, on ne s’engage jamais sur des volumes, mais notre taille nous le permet. Il faut sortir de cette approche un peu simpliste qui lie volume et réduction de prix. Et on le fait d’autant moins sur cette période dans laquelle on ne sait pas où on va. Sur quoi peut-on jouer ? Sur la part de marché. Je peux ainsi m’engager sur une promesse de concentrer ma dépense et de choisir certains partenaires car je ne vais pas pouvoir alimenter tout le monde. Je peux aussi m’engager sur une promesse de redémarrage. Quels sont mes atouts, au-delà des volumes, dans la phase de redémarrage ? Le secteur bancaire et des services est identifié comme étant l’un des premiers à redémarrer, on représente donc un intérêt pour les fournisseurs. Notre objectif : devenir le client préféré de ces fournisseurs. » 

Les fournisseurs ont-ils les ressources pour répondre aux appels d’offres ?

Antoine Delesalle : « Nous n’avons pas les moyens de répondre à autant d’appels d’offres que par le passé car nous avons de l’activité partielle. Sur 2020, il y a eu une recherche de compromis avec beaucoup d’entreprises pour étendre la durée de l’appel d’offres, pour faire preuve de souplesse sur la fourniture de certains éléments. Il est important de préparer l’appel d’offres avec les fournisseurs retenus bien en amont de l’appel d’offres. Est-ce que vous allez être créateur de valeur par rapport à mon besoin ? Quand on reçoit un appel d’offres qui n’a pas été anticipé, dans lequel la création de valeur n’est pas naturelle, la question de la sélectivité va alors se poser. »

Bertrand Lacotte : « De fait, avant de lancer un appel d’offres, il faut du répondant. Car il faut être deux pour mener une bataille vertueuse. D’une manière générale on a eu du répondant, notamment dans l’hôtellerie. Mais si on avait lancé un appel d’offres aérien, je pense qu’on aurait été confronté à peu ou pas de répondant des compagnies aériennes qui ont fait face à des réductions drastiques de personnel ou du travail partiel. »

Emmanuel Ebray : « On a un taux de réponse de 92% des hôtels pour nos clients. Cela dépend de la communication en amont qui est faite pour informer les chaines et les indépendants, et on a vu cette année les acheteurs s’impliquer davantage en faisant des vidéos qui ont été visionnées par les hôtels auditionnés pour expliquer la stratégie de l’entreprise, les volumes, les critères clés, la volonté… Une implication qui a, en retour, mobilisé les hôtels. »   

Christophe Roth : « Quand on fait le parallèle entre les appels d’offres aériens et hôteliers, la réactivité est beaucoup plus forte du côté des hôteliers. Le chômage partiel au sein des compagnies aériennes y est encore plus massif qu’ailleurs. On a des délais plus longs, des compagnies qui ont préféré étendre les tarifs plutôt que de repartir sur de nouvelles bases, et c’est finalement l’approche privilégiée par les entreprises : ne pas investir sur ces sujets, faire une extension sur 2021, et voir quand l’activité reprendra. Mais pour éviter des embouteillages à l’avenir, on commence à voir des appels d’offres aériens. Les compagnies les acceptent volontiers, c’est l’occasion de renouer le contact. »

Guillaume Ridolfi : « On a fait le choix de ne pas réduire nos ressources pour répondre aux appels d’offres car on a l’énorme chance d’avoir des capacités financières qui nous permettent de maintenir l’emploi. Je n’ai pas vu tant de « no go » à l’intérieur de notre écosystème de partenaires lors d’appels d’offres. Mais j’ai vu des réponses qui n’étaient pas à la hauteur de l’enjeu. Il ne faut pas oublier qu’on a beaucoup de nos confrères qui sont en train de jouer leur survie et si vous ne répondez pas à un appel d’offres, vous limitez vos chances de passer cette crise et d’aborder dans les meilleures conditions possibles la reprise à venir. Mais parfois ils n’arrivent pas à répondre de manière efficace car l’appel d’offres n’a pas été construit en tenant compte du contexte. Un appel d’offres trop complexe rend les choses très difficiles pour les fournisseurs. »

Jacques de Villeplée : « Il y a deux types de positionnement : soit on se replie sur soi et on attend que ça passe, soit on a une dynamique offensive. C’est ce que nous avons choisi. Et la notion de co-construction des appels d’offres est capitale. »  

Sur quels critères sélectionner les fournisseurs à auditionner ? 

Bertrand Lacotte : « Concernant les hôtels, on est clairement passé d’une logique de pénurie (on a dû étendre le périmètre car de nombreux hôtels de proximité étaient fermés) à une logique de rapprochement des points névralgiques en choisissant des établissements au plus proche de nos bureaux et de ceux de nos clients. On est davantage dans une logique de coûts complets : plus je suis proche de mes points névralgiques, moins j’ai besoin de transports terrestres complémentaires comme le taxi. La logique de sécurité sanitaire pour nos employés nous conduit par ailleurs à nous rapprocher des chaines qui sont en mesure de nous rassurer sur leurs capacités et sur la mise en œuvre des protocoles sanitaires stricts. Et enfin, notre politique voyages nous autorisant à utiliser des acteurs comme Airbnb car on a une population jeune, on réoriente nos employés vers des chaines traditionnelles pour des raisons sanitaires. »

Christophe Roth : « Dans l’aérien, on se concentre sur quelques routes stratégiques pour le client, bien souvent ce sont des routes internationales ou alors des ajustements sur le domestique car les parts de marché ont été revues avec le train. Ce sont donc des ajustements à la marge et non une refonte complète. » 

Quelles évolutions du contenu des appels d’offres ?

Antoine Delesalle : « Cela fait des années qu’on parle de RSE dans le voyage mais elle fait désormais partie des critères de choix. Cela devient une norme, il faut donc avoir une réponse fiable à apporter. Deuxième point : la roadmap. Allez-vous la tenir ? Quelle est la capacité des fournisseurs à délivrer réellement la roadmap et les innovations qu’ils ont décidé par le passé ? Troisième point : on essaie de faire comprendre à nos clients que tout baser sur le transactionnel quand il n’y a plus de transaction, ce n’est plus possible. Il n’y a pas qu’un modèle aujourd’hui, on essaie donc de mettre en place des modèles qui répondent au besoin des entreprises et qui créent de la valeur. »

Emmanuel Ebray : « La structure tarifaire change car les taux d’occupation seront loin en 2021 d’être au niveau de ceux de 2019. La LRA (dernière chambre disponible) n’a plus de raison d’être, plus besoin non plus de petits déjeuners ou alors sous une autre forme, en revanche besoin de flexibilité en termes d’annulation voire de parking. Donc on voit une évolution du mix prix. Autre élément : interrogation des acheteurs sur toutes les normes sanitaires, car il y eu beaucoup d’initiatives différentes des hôtels, cela a rendu les choses un peu complexes du point de vue des acheteurs. Enfin, les tarifs fixes sont la seule réponse pour garantir de rester dans le budget. On peut ajouter d’autres types de tarifs, comme les tarifs dynamiques, pour optimiser tout ça mais la logique de purs tarifs dynamiques ne permet pas d’être en contrôle sur la dépense hôtels. Donc un mix des deux mais avec la nécessité de garder des tarifs fixes sur les destinations principales. » 

Guillaume Ridolfi : « La RSE devient un sujet central comme le duty of care, mais aujourd’hui, dans le contexte sanitaire que l’on connait, on n’a plus le choix que d’adresser ces deux sujets de manière industrielle et pérenne. On a aussi beaucoup de questions autour du ROI, par exemple sur la récupération de la TVA. Et puis autre sujet fort : comment gérer le déconfinement ? Comment mes partenaires vont-ils gérer eux-mêmes le déconfinement et m’aider dans ma démarche ? Comment je m’assure d’une bonne reprise de mes voyages avec la bonne stratégie, les bons outils et le bon accompagnement ? »

Jacques de Villeplée : « La RSE bien sûr, le voyager mieux, la digitalisation, sont les sujets principaux. Je ne parlerais pas de tarifs dynamiques mais de collaboration dynamique. Prendre en compte la contrainte des deux partenaires peut être intéressant dans l’appel d’offres. Dans le monde de la location de voitures, vous avez le fameux pic du mercredi, l’ensemble de vos collaborateurs se déplace très souvent le mardi et le mercredi, un peu moins le jeudi. Pour nous, c’est compliqué car nos voitures sont un peu moins utilisées le lundi, le jeudi et le vendredi. Comment pourrait-on mieux lisser l’offre et la demande ? Cela nous permettrait de travailler sur une offre différente, avec un impact sur les prix et on serait sur du gagnant-gagnant. »

Compte tenu de l’absence de visibilité, les contrats signés aujourd’hui seront-ils caducs demain ? 

Bertrand Lacotte : « On voit bien l’accélération des rythmes, l’incertitude, on doit entrer dans des logiques dynamiques, la stabilité à long terme n’existera plus. Les contrats ne changeront pas la réalité, c’est la réalité qui doit se transcrire dans les contrats. Je ne serai pas surpris qu’on ait un redémarrage exceptionnel dans le voyage, et de fait les conditions ne seront pas caduques par défaut mais par excès. Ce sont les bonnes nouvelles qui nous feront rediscuter ensemble ce qu’on aura négocié. »

Christophe Roth : « Avec le fournisseur, on ne signe pas un contrat sur trois ou cinq ans sans se parler régulièrement. Cela nécessite de faire des points sur l’activité, il y a une flexibilité attendue car les volumes peuvent baisser à nouveau s’il y a une troisième vague, mais a contrario il peut y avoir un effet de rattrapage. On peut mettre des clauses de flexibilité dans les contrats mais le relationnel est le plus important. »

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Le nouveau livre blanc de l’AFTM sur la RSE : les points à retenir

Gros succès pour le webinar du 10 novembre dernier à l’occasion de la sortie du dernier livre blanc de l’AFTM sur la RSE ! Cinq intervenants ont répondu aux questions de l’animateur François-Xavier Izenic et des internautes : Isabelle Juppé, directrice du développement durable et de la RSE du Groupe Lagardère, Sylvain Guyoton, senior vice president chez EcoVadis, Arnaud de Lamezan, vice-président de l’AFTM délégué aux nouvelles mobilités et aux achats responsables, Loïc Simon, administrateur de l’AFTM en charge de la formation, Michel Dieleman, président de l’AFTM. 

 

Pourquoi ce livre blanc tombe-t-il à point nommé ?

« Il arrive au bon moment, à cause de cette crise qui nous frappe et qui nous impose de nous réinventer » selon Isabelle Juppé, qui ajoute : « ma conviction est que la crise va pousser au changement, la RSE peut être une réponse à ce qui se passe aujourd’hui grâce à l’utilisation de cinq de ses leviers principaux : 

  • La confiance. C’est fondamental, il faudra que le secteur de la mobilité soit de plus en plus un vecteur de confiance et qu’il rassure sur la protection sanitaire.
  • L’innovation, sur le plan environnemental mais aussi sur celui des services.
  • La transparence. C’est un sujet qui monte, dans le domaine alimentaire par exemple. Mais pour les voyages, ce sera pareil, il faudra aider le voyageur à prendre la bonne décision, notamment en lui fournissant des données précises sur les émissions de CO2 de tel ou tel service ou fournisseur. 
  • La collaboration. Travailler ensemble dans une logique de partenariat. La crise va favoriser ce partenariat. 
  • Le sens. Cela veut dire : pourquoi ce voyage ? Se poser la question du sens et de la raison d’être du voyage. » 

 

Quel est l’objectif de ce livre blanc ?

Michel Dieleman : « Ce livre blanc est une invitation à faire. On est au début d’un grand projet collectif qui vise à faire converger les déplacements et les impacts positifs sur la société et l’environnement. Mettre le cap sur la RSE sans concession, cela signifie de ne pas tergiverser, il est urgent d’agir avec tous les acteurs de l’industrie. On est bien au-delà du verdissement des déplacements. Les impacts sont aussi économiques et sociétaux. C’est une question collective, stratégique, opérationnelle et humaine. » 

 

Les entreprises sont-elles en retard en matière de RSE appliquée aux déplacements ? 

Arnaud de Lamezan : « Les entreprises ont déjà beaucoup travaillé sur la RSE, en donnant la priorité aux impacts directs de leurs activités. Le voyage d’affaires fait partie des impacts indirects et c’est logique qu’il soit travaillé dans un deuxième temps. Et rendons à César ce qui appartient à César : les prestataires du voyage d’affaires ont travaillé depuis plus longtemps ces sujets car justement leurs impacts directs sont en jeu : les transporteurs, les hôteliers… »

 

Quelle est la structure du livre blanc ?

Michel Dieleman : « Le premier objectif était de le rendre lisible avec trois cahiers : le premier « comprendre la RSE dans les mobilités d’affaires », pour savoir de quoi on parle, ensuite les enjeux et le futur des mobilités d’affaires et enfin les fiches pratiques. Sans prétendre à l’exhaustivité, on y trouve un éclairage d’ensemble sur le sujet, des partages de bonnes pratiques et des recommandations permettant de mettre en œuvre une stratégie de mobilité ambitieuse et responsable. »

 

La RSV, la Responsabilité Sociétale du Voyageur mise en avant dans le livre blanc, c’est quoi ?

Arnaud de Lamezan : « Je ferai un parallèle en citant le président Kennedy : « ne vous posez plus la question de savoir ce que l’Amérique ferait pour vous mais plutôt de ce que vous pouvez faire pour l’Amérique ». Pour le voyageur, c’est pareil : si on veut faire avancer la démarche RSE dans le voyage d’affaires, il faut embarquer le voyageur avec soi. En l’amenant notamment à se poser les bonnes questions : quel est le sens de son voyage, est-ce qu’il y a des moyens alternatifs, quelle sont les réputations de ses fournisseurs… » 

Michel Dieleman : « Ce livre blanc ne vient pas s’inscrire contre le voyageur d’affaires mais avec lui. Dans ce schéma, il garde sa place centrale. L’équilibre à trouver est subtil, il repose moins sur la contrainte que sur la conviction. »

 

La RSE peut-elle améliorer le sort des voyageurs d’affaires en situation de handicap ?

Loïc Simon : « Pour une personne à mobilité réduite (PMR) en voyage d’affaires, le déplacement, notamment le transport, est un vrai parcours du combattant. Dans les gares ou les aéroports, à bord d’un train ou d’un avion, c’est beaucoup de temps et de stress supplémentaires. D’autant que la prestation de services est assez déshumanisée, vous avez l’impression d’être un bagage supplémentaire, on est traité comme un objet, on nous pose là et on doit attendre. L’obligation du timing propre au voyageur d’affaires n’est pas prise en compte. Il faut donc davantage d’échange avec les prestataires. Quand on est en négociation avec eux, voir précisément où ils en sont en matière de handicap. Leur faire comprendre qu’ils doivent intégrer cette notion de voyage d’affaires dans la prestation de services PMR. Il faut forcer la main pour qu’un déplacement d’un PMR ressemble à celui d’une personne valide. » 

 

Quel rôle peut jouer le travel manager dans la mise en place de la RSE appliquée aux déplacements ?

Arnaud de Lamezan : « Le travel manager va être l’étincelle qui va allumer le feu de la RSE. Il faut d’abord qu’il construise un premier argumentaire, rassembler un certain nombre d’éléments issus des fournisseurs, issus d’un benchmark avec ses autres collègues travel manager. Avec cet argumentaire, il va essayer de convaincre d’autres services, aller voir sa direction générale et dire : « voilà le projet, cela s’inscrit dans la démarche globale RSE de l’entreprise, et je suis prêt à lancer la démarche sur les voyages d’affaires de l’entreprise. » il faut éviter à tout prix de vouloir travailler seul alors que c’est un merveilleux travail d’équipe. Deuxième mauvaise pratique, ce serait d’être dogmatique et rigide, cela n’a pas sa place. Quand on se fixe des objectifs, il faut qu’ils soient atteignables afin de célébrer le succès ensemble. »

Michel Dieleman : « C’est en effet un merveilleux travail d’équipe. Les mobilités durables sont exigeantes, elles comportent des complexités opérationnelles, humaines et économiques. Le travel manager est un acteur fort mais d’autres ont un rôle important : les acheteurs, les RH les équipes RSE, les équipes chargées des plans de mobilités, la communication internet et externe, les équipes handicap quand elles existent et sans oublier le voyageur d’affaires. » 

 

La RSE est-elle un bon prétexte pour faire baisser les budgets voyages ? 

Arnaud de Lamezan : « Si une entreprise entre dans une démarche RSE juste pour faire baisser ses budgets voyages, c’est déjà une bonne nouvelle. Cela veut dire qu’elle n’a pas tout compris certes, seulement un petit bout, mais elle est déjà sur la bonne voie. En revanche, elle va assez vite être rattrapée par la patrouille car les collaborateurs vont lui dire : « nous, on cherche le vrai sens ». Si les collaborateurs ne se font pas tromper longtemps, il y a aussi des pressions extérieures à l’entreprise qui lui demandent des comptes. »

 

Où en sont les prestataires du voyage d’affaires en matière de RSE ?

Sylvain Guyoton : « On a évalué près de 600 entreprises (dans 50 pays) dans les domaines de l’aérien, de l’hôtellerie et des agences de voyages. On peut les diviser en trois groupes :

  • Un tiers des entreprises n’ont pas fait grand-chose. 
  • Un tiers qui se sont engagés sur des politiques de RSE mais de manière partielle. 
  • Un tiers qui a des pratiques adaptées par rapport aux enjeux auxquelles elles sont confrontées. 

Si l’on s’en tient aux prestataires français, on peut dire qu’ils font plutôt partie des bons élèves. Le timing de ce livre blanc est parfait car avec la crise pandémique on se pose beaucoup de questions. Dans 10 ans, on se rendra compte que l’année 2020 aura été une année d’inflexion. Il ne s’agit pas de voyager plus ou moins mais de voyager mieux. »

 

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Webinar AFTM – Aérien et crise du Covid19 : quid des avoirs, reports et remboursements ?

Ce premier webinar d’une série de trois sessions organisée par l’AFTM (session 1 : l’aérien, session 2 : le ferroviaire, session 3 : les périmètres connexes aux déplacements professionnels) sera l’occasion d’échanger sur le lourd impact de la pandémie sur le marché aérien et du difficile redémarrage qu’il conviendra de gérer au mieux par les compagnies aériennes mais aussi par les entreprises ou organismes clients.

Les mesures qui sont mises en place par les compagnies aériennes pour gérer les annulations liées au Covid-19 et leurs conséquences pour les différents acteurs de l’industrie du voyage d’affaires seront également à l’ordre du jour.
 

Rejoignez-nous :
Le lundi 27 avril
de 11h à 12h15


Avoirs, reports, remboursements :

  • Quelles sont les mesures commerciales mises en place par les compagnies aériennes ? Elles concernent évidemment les entreprises mais à qui sont-elles adressées, aux voyageurs ou aux entreprises ?
  • Quelles sont les bonnes pratiques à recommander aux acheteurs et aux travel managers?
  • Quels sont les rôles des TMC et des GDS ? Quid des impacts sur d’autres acteurs tels que les prestataires de solutions technologiques (gestion automatisée des déplacements, tracking lié à la sûreté des voyageurs) ?