Aérien : le malaise des travel managers

Des travel managers alertent sur la dégradation des relations entre les entreprises et les transporteurs aériens. En cause : la norme NDC bien sûr mais pas seulement.

La question qui fâche. C’est Sue Jones, travel manager monde de Ingka Group, la holding qui coiffe Ikea, qui l’a posée début octobre lors d’une conférence organisée à Londres par ITM, l’équivalent britannique de l’AFTM, et relayée par Business Travel News : « Les compagnies aériennes ont-elles autant besoin de nous qu’avant ? » 

Cette table ronde, qui rassemblait trois poids lourds du travel management (les directeurs voyages de Ingka Group, Accenture et TikTok) et trois représentants de compagnies aériennes (American Airlines, British Airways et Qatar), a illustré les fortes tensions du moment entre les transporteurs et leurs clients entreprises. 

A l’origine de la brouille, la nouvelle norme de distribution NDC évidemment qui génère nombre de perturbations, notamment des difficultés à accéder au contenu via les canaux préférentiels, entraînant des fuites dans les programmes voyages.

Sue Jones s’agace en effet : « Tous les jours ma boite mail est envahie par des messages de voyageurs qui disent : je peux trouver moins cher en passant par la vente directe, je peux faire cela moi-même. » Moins cher, vraiment ? Dans The Company Dime, l’outil de réservation online américain AmTrav confirme: « Les entreprises ayant accès au NDC d’American Airlines ont payé en septembre en moyenne 14% de moins que celles qui n’y ont pas accès. »

Des objectifs contraires

Mais l’argument tarifaire ne suffit pas à convaincre Sue Jones qui insiste sur les objectifs «diamétralement opposés » des compagnies aériennes et des entreprises : « Avec cette stratégie de vente moderne, dont nous comprenons la réalité économique, les compagnies traitent les voyageurs individuels comme des clients. C’est tout à fait acceptable pour le segment loisirs mais dans le voyage d’affaires, c’est nous, entreprises, qui sommes les clients. »

Jan Jacobsen, directeur des achats voyages monde chez Accenture, est d’accord pour dire que « les compagnies aériennes se concentrent trop sur le client final et non sur le payeur. » Et de poursuivre : «Je ne dis pas qu’il ne faut pas s’occuper des voyageurs mais nous avons des politiques voyages en place pour des raisons bien précises. » 

Pas de quoi émouvoir Kyle Cumbie, le directeur des ventes mondiales d’American Airlines, qui répète en effet que la stratégie à long terme de la compagnie est « axée sur le voyageur ». Et de préciser : « Ce qui a motivé cette stratégie, c’est la nouvelle réalité des voyages. » 

En clair, Kyle Cumbie entérine la montée en puissance de la clientèle loisirs mais, plus intéressant encore, affirme que, si les « volumes par entreprises sont beaucoup moins importants qu’avant, ceux des PME (et notamment non intermédiés, donc non gérés par une TMC) augmentent de manière significative, à des niveaux jamais vus. »

La concurrence du segment loisirs

David Oppenheim, directeur des ventes mondiales de British Airways (BA), approuve : « Les activités loisirs de BA ont énormément augmenté depuis la pandémie tandis que le trafic affaires est nettement inférieur à ce qu’il était. » David Oppenheim pousse alors plus loin l’explication : « Avant le Covid, l’écart entre le prix moyen payé par un voyageur d’affaires et celui payé par un voyageur loisir était très conséquent. L’ennui est qu’il s’est considérablement réduit. » Ce qui signifie qu’en offrant aux voyageurs d’affaires les mêmes réductions qu’avant le Covid, ces derniers pourraient devenir les « pires clients » du transporteur !

Sur la nouvelle importance du segment loisirs, Jan Jacobsen, d’Accenture, prend les compagnies aux mots : « Elles doivent considérer notre proposition de valeur de manière holistique. Chez Accenture, je vous donne accès à 740 000 employés dans le monde qui voyagent aussi pour leurs loisirs. Pourquoi cela n’a-t-il pas de valeur ? Cela devrait aussi entrer dans l’équation. » 

Sue Jones prévient néanmoins les compagnies : « Vous n’avez peut-être plus autant besoin de nous qu’avant, mais à un moment donné les voyages loisirs vont plafonner, voire chuter. » 

Cité par The Compagny Dime, Cory Garner, l’ancien patron de la distribution chez American Airlines et aujourd’hui consultant indépendant, douche rapidement les espoirs : « Les compagnies profitent généralement de cycles économiques temporaires pour modifier de façon permanente leur mode de fonctionnement. La quantité de personnel, de systèmes et de capital relationnel pour mettre en place des programmes de remises aux entreprises et de commissions est énorme. Il est très peu probable qu’un transporteur qui s’est débarrassé de cette infrastructure puisse la rétablir facilement. En réaction aux futurs cycles économiques, il utilisera les outils dont il dispose déjà : prix, réseau, programmes de fidélisation… » 

Pour ceux qui en doutaient encore, on a bien changé d’ère dans les relations entre compagnies aériennes et entreprises. 

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Présentation de British Airways et Iberia

British Airways a été un membre fondateur de l’alliance oneworld, appartient au groupe IAG et est la plus grande compagnie aérienne régulière internationale du Royaume-Uni, desservant près de 600 destinations à travers le monde.

Que les clients soient dans les airs ou au sol, nous sommes fiers d’offrir une expérience de service complet. British Airways est une compagnie aérienne mondiale, qui rapproche les gens, les lieux et les cultures diverses depuis plus de 100 ans. Servir notre communauté et notre planète est au cœur de tout ce que nous faisons, et nous sommes impatients de partager nos initiatives passionnantes de développement durable avec vous.

Chez Iberia, nous volons depuis 95 ans avec un seul objectif : « Depuis l’Espagne, nous générons de la prospérité en connectant les gens au monde. » Notre raison d’être est ce qui nous identifie, notre ADN, notre engagement envers nos clients, nos partenaires, nos employés et l’environnement.

Nous sommes la plus grande compagnie aérienne d’Espagne et le premier transporteur entre l’Europe et l’Amérique latine. Nous appartenons au groupe IAG et sommes membres de l’alliance mondiale des compagnies aériennes. Avec Iberia Express et Iberia Regional Air Nostrum, nous desservons depuis le hub de Madrid vers quelques 50 pays à travers le monde. Depuis quelques années, Iberia place la durabilité environnementale et sociale au cœur de l’entreprise, mais cette année, elle est allée plus loin et a fait de la durabilité l’un des piliers de son plan stratégique pour les trois prochaines années.

Pourquoi être partenaire de l’AFTM ? Et pourquoi maintenant ?

Malgré l’impact financier de la pandémie sur nos activités, nous avons continué d’investir dans de nouveaux avions, cabines et aliments et boissons pour le plus grand plaisir de nos clients. Nous avons également placé le développement durable au cœur de tout ce que nous faisons. L’AFTM a été d’un grand soutien pendant la pandémie et est un partenaire essentiel dans cette période de transition. En effet, l’AFTM est un acteur incontournable de l’écosystème du voyage d’affaires.

Nous souhaitons participer aux événements organisés par l’AFTM afin d’échanger avec ses membres et partenaires. Nous recherchons le partage d’expériences et le partage d’expertises.

Quels sont les enjeux de votre marché dans les 6 prochains mois ?

Bien que la demande demeure forte, nous sommes conscients des incertitudes entourant les perspectives économiques et des pressions persistantes sur les ménages. Dans ce contexte, nous nous concentrons sur l’adaptation de nos opérations pour répondre à la demande, le renforcement de notre bilan en reconstruisant notre rentabilité et nos flux de trésorerie et la capitalisation de notre niveau élevé de liquidité. Cela nous permettra d’affecter des capitaux tout en investissant de manière disciplinée dans notre service et notre personnel, afin de renforcer les capacités et de permettre la croissance future.

Alors que nous renforçons notre résilience opérationnelle, nous sommes confiants dans nos forces en tant que Groupe (International Airline Group, IAG) : premièrement, un portefeuille de grandes marques aériennes ; deuxièmement, des positions de leader sur nos marchés et hubs ; et troisièmement, la flexibilité offerte par IAG pour stimuler l’efficacité opérationnelle et l’innovation. Ceux-ci nous permettront de revenir aux niveaux de profit d’avant la COVID et de générer de la valeur à long terme pour toutes nos parties prenantes.

Nous approchons de la dernière ligne droite de cette année avec un solide réseau de destinations et un programme de vols attractifs, tant pour les voyages d’affaires que pour les loisirs. Par exemple, au premier trimestre 2023, et grâce à l’arrivée de nouveaux avions, Iberia volera à 105% du niveau de 2019 (aux États-Unis, Iberia augmente sa capacité de 15% par rapport à 2019). En septembre, Iberia a de nouveau été la compagnie aérienne la plus ponctuelle d’Europe, comme l’a confirmé le cabinet de conseil international Cirium -anciennement FlightStats-. C’est le quatrième mois consécutif que la compagnie aérienne espagnole monte sur la plus haute marche du podium en matière de ponctualité, au cours d’un été particulièrement difficile dans de nombreux aéroports européens et américains.

British Airways was a founding member of the oneworld alliance, belong to IAG Group and is the UK’s largest international scheduled airline, flying to nearly 600 destinations around the world.

Whether customers are in the air or on the ground, we take pride in providing a full- service experience. British Airways is a global airline, bringing people, places and diverse cultures closer together for more than 100 years. Serving our community and planet is at the heart of everything we do, and we look forward to sharing our exciting sustainability initiatives with you.

At Iberia we have been flying for 95 years with a single purpose: “From Spain, we generate prosperity by connecting people with the world.” Our purpose is what identifies us, our DNA, our commitment to customers, our partners, our employees, and the environment.

We are Spain’s largest airline and the leading carrier between Europe and Latin America. We belong to the IAG group and are a member of the oneworld airline alliance. Along with Iberia Express and Iberia Regional Air Nostrum, we fly from its Madrid hub to some 50 countries around the world. For some years now Iberia has placed Environmental and Social Sustainability at the heart of the company, but this year it has gone a step further and has made sustainability one of the pillars of its strategic plan for the next three years

Why partner with the AFTM? And why now?

Despite the financial impact the pandemic has had on our business we have continued to invest, in new aircraft, cabins and food and drink to delight our customers. We have also put sustainability at the heart of everything we do. The AFTM has been very supportive during the pandemic and is an essential partner in this period of transition. Indeed, AFTM is key player on the business travel ecosystem.

We wish to take part in the events organized by the AFTM in order to exchange with its members and partners. We seek the sharing of experiences and the sharing of expertise.

What are the challenges for your market in the next 6 months?

While demand remains strong, we are conscious of the uncertainties in the economic outlook and the ongoing pressures on households. Against this backdrop, we are focused on adapting our operations to meet demand, strengthening our balance sheet by re-building our profitability and cashflows and capitalising on our high level of liquidity. This will allow us to allocate capital while investing in a disciplined way in our service and our people, to build capacity and enable future growth.

As we build back our operational resilience, we are confident in our strengths as a Group (International Airline Group, IAG): first, a portfolio of leading airline brands; second, leading positions in our key markets and hubs; and third, the flexibility afforded by IAG to drive operational efficiency and innovation. These will enable us to return to pre-COVID levels of profit and generate long-term value for all our stakeholders.

We are approaching the final stretch of this year with a strong network of destinations and a programme of attractive flights, both for business and leisure travel. As example, In the first quarter of 2023, and thanks to the arrival of new aircraft, Iberia will fly at 105% the level of 2019 (in the US, Iberia increases its capacity by 15% compared to 2019). In September, Iberia was once again the most punctual airline in Europe, as confirmed by the international consulting firm Cirium -formerly FlightStats-. This is the fourth consecutive month in which the Spanish airline tops the punctuality podium, during a particularly difficult summer at many European and United States airports.

Aérien : attention, les tarifs dynamiques arrivent !

Aérien : attention, les tarifs dynamiques arrivent !

Le transport aérien se prépare à des changements tarifaires sans précédent, accélérés par la pandémie.

« Tarification continue » : les dirigeants des compagnies aériennes du monde entier n’ont plus que ces mots-là à la bouche selon le site Skift qui a livré un excellent article sur le sujet (Lire ici). De quoi s’agit-il ? Les transporteurs veulent « s’affranchir des vieilles méthodes » et « fixer le prix des billets avec autant de souplesse que les applications de covoiturage telles qu’Uber». En clair, ils veulent pouvoir calculer et présenter leurs prix pratiquement en temps réel.

Pour bien comprendre, il convient de saisir comment les choses se passaient jusqu’à présent (et se passent encore). Les grandes compagnies aériennes regroupaient leurs tarifs en 26 tranches, avec une classe tarifaire correspondant à une lettre de l’alphabet. La lettre « F » d’une compagnie peut signifier un billet de première classe plein tarif tandis que la lettre « Z » peut désigner un billet en classe éco à prix très réduit que le voyageur doit acheter au moins trois semaines avant le départ.

Lorsque les places sont épuisées dans une classe tarifaire, à 79 euros par exemple, les ordinateurs proposent généralement des sièges dans une classe plus chère, disons 99 euros, quelle que soit la demande.

« La tarification continue fait exploser ce système » explique Skift, l’objectif étant de proposer des tarifs plus dynamiques en évitant un saut tarifaire trop important d’une classe à l’autre et en offrant des prix s’adaptant mieux à la demande en temps réel. Dans notre exemple, des tarifs à 77, 78 euros ou 80, 81 euros. Donc à l’euro près.

« L’objectif est de permettre à une compagnie aérienne de choisir le meilleur tarif qui maximisera ses revenus » a écrit Nicholas Liotta, chercheur au MIT de Boston. Certains tests ont révélé en effet que la tarification continue ou dynamique pourrait augmenter les revenus des transporteurs de 10% !

L’autre avantage de cette nouvelle tarification est de pouvoir composer et démultiplier très facilement des packages combinant un vol et une option tel un siège avec plus d’espace pour les jambes. Bref, il s’agira de tirer le maximum d’argent des passagers en fonction de leur volonté de payer à un moment T.

Et bien sûr, pour accéder à ces tarifs, il faudra utiliser des canaux qui offrent un contenu NDC (new distribution capability). C’est Lufthansa qui a proposé la première des tarifs dynamiques en octobre dernier, British Airways a suivi en décembre et Air France-KLM a annoncé en mars dernier un accord avec la société technologique Accelya pour la mise en place très prochaine de cette tarification continue. Rappelons que les contenus NDC de la compagnie française seront accessibles via Amadeus le 1er novembre prochain… contre surcharge de quelques euros par segment.

Cité par Skift, Jim Davidson, chef de produit chez Accelya, explique que « la tarification continue est le sujet le plus brûlant de l’après-Covid car la concurrence sur les prix va être féroce, les compagnies aériennes se battant pour récupérer des clients. La sensibilité aux prix sera donc extrêmement volatile, et la tarification continue permettra de réagir de manière beaucoup plus instantanée et précise aux variations de la volonté de payer des clients ».

Pour de nombreux observateurs, la tarification continue va se généraliser assez rapidement bien qu’il demeure encore des difficultés techniques et règlementaires. Les travel managers et les acheteurs doivent d’ores-et-déjà s’y préparer car cette nouvelle tarification va leur donner du fil à retordre. Chris Anthony, cofondateur et directeur général de Kambr Advisory, qui aide les compagnies aériennes à mettre en place des solutions de tarification continue, explique dans Business Travel News Europe (Lire ici) que « les entreprises aiment avoir des certitudes et ce système enlève presque toute certitude ».

Mais d’après lui, la tarification dynamique présente aussi des avantages : « Elle pourrait rendre moins fréquente les grandes fluctuations des tarifs aériens et limiter certaines particularités actuelles, comme lorsque les tarifs en classe affaires sont inférieurs sur certains vols à ceux de la classe économique ». Peut-être, mais une chose est sûre : on s’approche de plus en plus d’une tarification à la tête du client, et cela promet un sérieux… casse-tête pour les travel managers et les acheteurs !

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM