Amex GBT, TripActions, … : la bataille des PME a commencé

Introduction en bourse pour Amex GBT, accord avec Lufthansa pour TripActions qui, par ailleurs, se déploie en Europe : derrière ces deux événements, l’énorme enjeu des PME. 

Pour les TMC, c’est une lutte sans merci qui se prépare. Avec les PME en ligne de mire. Et pour cause : quasiment tous les grands comptes annoncent des baisses drastiques de leurs déplacements professionnels pour les années à venir, si bien que les PME pourraient constituer l’un des seuls relais de croissance des distributeurs, mega-TMC ou non. Dans ce marché déprimé par la pandémie, les PME ont d’ailleurs été les premières à reprendre le chemin des voyages.  

L’enjeu est de taille : selon Amex GBT, le marché mondial non intermédié des PME, qui se débrouillent donc sans le support des TMC, en réservant auprès des fournisseurs et des agences de voyages en ligne, serait estimé à 675 milliards de US$ ! A comparer avec le marché intermédié de ces petites et moyennes entreprises qui s’élevait à 270 milliards de US$ avant le Covid. 

Le rachat d’Egencia par Amex et celui de Reed & Mackay par TripActions furent une première salve. L’annonce il y a quelques jours de l’introduction en bourse d’Amex GBT en est une deuxième. Pour mener cette bataille des PME, le géant américain a en effet besoin de liquidités. Or, à l’instar de toutes les TMC, il a été durement éprouvé par la pandémie comme en atteste le document public de 53 pages fourni par Amex GBT à l’autorité américaine des marchés financiers (SEC), une vraie mine d’informations dont je vous recommande la lecture intéressante et qui mériterait plusieurs articles.

On y apprend ainsi que la méga-TMC, sans aucun doute la plus profitable avant la pandémie, a affiché en 2020 une perte opérationnelle de 363 millions de US$ contre un EBITDA (bénéfice opérationnel) de 428 millions de US$ en 2019. Montant auquel il faut ajouter la perte de 248 millions de US$ d’Egencia et celle, plus anecdotique, de 21 millions de US$ d’Ovation Travel, autre TMC spécialisée sur les PME rachetée par GBT en janvier 2021. Soit une perte opérationnelle consolidée de 625 millions de US$ (après ajustements).

Amex GBT a dû faire face également à d’importants coûts de restructuration (réduction d’effectifs) de 206 millions de US$ en 2020 contre 12 millions seulement en 2019. Ils ont été compensés par des économies d’une valeur de 235 millions de US$, soit 13% de sa base de coûts en 2019. 

Selon la presse financière américaine, l’introduction en bourse devrait apporter 1,2 milliard de US$ d’argent frais à Amex GBT mais pas seulement. La TMC a obtenu également une facilité de crédit de 1 milliard de US$, dont 600 millions serviront à rembourser des prêts arrivant à terme, et 400 millions pour financer les besoins généraux de l’entreprise, notamment les opérations de croissance externe. 

Un vrai ballon d’oxygène et une force de frappe importante qui vont permettre de soutenir la stratégie ultra-offensive à l’égard des PME pour laquelle Amex GBT affiche désormais clairement ses ambitions. Le fameux document remis à la SEC confirme que la stratégie de croissance de la TMC consiste à cibler le marché des PME qu’il décrit comme « le segment de l’industrie le plus large et qui connait la croissance la plus forte ». Et Paul Abbott, le patron d’Amex GBT, de renchérir en marge de cette annonce dans des propos rapportés par The Company Dime : « C’est le segment qui dégage les marges les plus élevées et celui qui se remet le plus rapidement de la pandémie. » On lit d’ailleurs dans le document que si les PME totalisent désormais 45% des revenus du groupe suite au rachat d’Egencia, elles représentent (a minima) plus de 50% des bénéfices. 

Comme un fait exprès, TripActions a annoncé au même moment son déploiement en Europe et l’ouverture de son bureau à Paris en janvier prochain. A longueur d’interviews, le nouveau patron pour l’Europe du Sud, Zahir Abdelouhab, ne cache pas ses ambitions sur le marché des PME, avec un appétit qui semble insatiable. Et ce n’est pas un hasard si la TMC nouvelle génération lance avec Lufthansa une plateforme de réservation et de gestion qui cible justement les clients PME de la compagnie aérienne. 

Restent à ce stade plusieurs questions en suspens. Amex GBT sera-telle la première mega-TMC à réussir sur ce marché des PME alors que les tentatives des uns ou des autres ont toujours échoué par le passé ? Ces petites et moyennes entreprises vont-elles se laisser séduire par le profil très techno de TripActions ? Les deux acteurs y accordent des moyens inédits et conséquents, et le marché tranchera, d’autant que les autres TMC fourbissent aussi leurs armes. L’affrontement s’annonce déjà rude et féroce mais passionnant. 

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

CWT : derrière le Chapter 11

La procédure engagée par la TMC mérite quelques éclaircissements pour bien en saisir les enjeux.

On ne le répètera jamais assez : le Covid a été un choc sans commune mesure pour l’ensemble des TMC. Pour CWT, le coup a été d’autant plus rude que l’année 2019 avait été celle de tous les records selon des informations rapportées par le site The Company Dime qui a consulté les documents déposés dans le cadre de la procédure judiciaire. La TMC avait alors réalisé un volume d’affaires de 23,1 milliards de US$ pour un chiffre d’affaires de 1,5 milliard de US$ et généré un EBITDA (bénéfice d’exploitation) de 239 millions de US$.

Sauf que CWT est lestée d’une lourde dette de 1,5 milliard de US$, intenable en ces temps de vaches maigres, les revenus moindres ne permettant pas d’en rembourser les échéances. La TMC n’avait au final d’autre choix que de se mettre sous la protection de la loi américaine sur les faillites, le fameux Chapter 11, dont l’esprit et la lettre sont bien différents des procédures françaises.

J’ai donc contacté sur LinkedIn Marc Bertonèche, professeur d’économie à Harvard, Oxford et HEC, l’un des spécialistes français du Chapter 11, pour en décrypter les arcanes en lui expliquant le cas CWT. Sa réponse fut simple et claire : « Le grand avantage du recours au Chapter 11 est qu’il permet de restructurer la dette tout en continuant l’exploitation de l’entreprise sans qu’à aucun moment les créanciers puissent exiger quelque remboursement que ce soit ». Et de poursuivre : « Cela procure donc à l’entreprise une période de calme et de sérénité pour lui permettre de se réorganiser et de se relancer, ce qui lui serait impossible sans le Chapter 11 sous la pression des créanciers divers ». 

En 2015, Marc Bertonèche avait écrit un très bon papier dans Les Echos pour dire la « remarquable efficacité » de ce dispositif qui avait permis, à la suite de la crise des subprimes, de restructurer 2000 milliards de US$ de dettes de sociétés américaines en 2008 et 2009. Il appelait alors la France à s’en inspirer : « Alors que, dans bon nombre de pays, les lois de la faillite ont pour objectif premier de satisfaire immédiatement les créanciers en liquidant les sociétés en détresse, le Chapter 11 est un véritable acte de gestion permettant de mettre en œuvre tout ce qui est nécessaire pour assurer leur survie et la reprise de leur activité ». 

Cette procédure a cependant plusieurs inconvénients : elle est chère (elle nécessite de recruter une armée de conseillers juridiques pour satisfaire à toutes ses obligations) et elle peut être très longue, avec le risque de ternir l’image de la société auprès des clients et des fournisseurs. On se souvient qu’au milieu des années 2000, Delta Air Lines était restée 19 mois sous ce régime. 

Pour aller plus vite et économiser des frais, il existe donc ce qu’on appelle la procédure de « pre-packaged bankruptcy », choisie par CWT. En clair, il s’agit d’anticiper en rédigeant un pré-accord avec tous les créanciers pour transformer une partie de la dette en actions afin d’entrer et de sortir tout de suite du Chapter 11. C’est ce qu’a fait CWT en annonçant dès le 14 septembre un accord avec 90% de ses créanciers puis le 1er octobre la mise en place d’une procédure de Chapter 11 « pre-packaged ».

Le toujours excellent site The Company Dime nous en apprend un peu plus sur les coulisses de la situation. Le journaliste a interrogé deux experts juridiques qui ont tous deux (et séparément) déclaré que, pour cette procédure, « c’est un signe fort que CWT utilise Kirkland & Ellis comme conseiller juridique. Ils sont connus comme l’un des principaux cabinets d’avocats spécialisés dans les faillites de grandes entreprises. (…) Cela vous indique que ceux qui contrôlent cette procédure attribuent une valeur importante à l’entreprise. »

Les deux experts se sont aussi amusés d’apprendre que CWT avait déposé son dossier devant le tribunal des faillites du district sud du Texas. CWT, dont le siège est au Minnesota, est présent au Texas, ce qui permet techniquement à la TMC d’y déposer son dossier. Le tribunal ferait partie d’une petite poignée de tribunaux « favorables aux débiteurs » dans le pays, a révélé l’un deux. « Ce tribunal a mis en place un registre séparé pour les grosses affaires commerciales compliquées. Il y a deux juges et ils sont rapides ». 

Si certaines procédures « pre-packaged » ont été conclues quelques jours après le dépôt du dossier, un délai de plusieurs semaines est néanmoins plus courant. Selon le calendrier des procédures, CWT planifie d’entamer les procédures du Chapter 11 au plus tard le 7 novembre devant le tribunal des faillites du district sud du Texas. Dans une lettre datée du 1er octobre, Michelle McKinney Frymire, la nouvelle directrice générale de CWT, prévoit « de mener à bien cette procédure judiciaire très rapidement, voire en un seul jour ». Après cela, CWT disposera selon The Company Dime « de liquidités substantielles (350 millions de US$ ont été évoqués) et d’une dette diminuée d’environ 50 % ». La nouvelle équipe pourra alors repartir d’un bon pied, c’est évidemment tout le mal qu’on lui souhaite. 

L’actionnariat ainsi modifié, CWT sera entre les mains de nouveaux propriétaires. C’est une page qui se tourne pour la famille Carlson qui avait fusionné ses activités voyages d’affaires avec celles du groupe Accor en 1994, donnant ainsi naissance à un géant. Pour l’anecdote, j’avais rencontré en 1999 la patronne, Marilyn Carlson, dans son bureau à Minneapolis quand j’étais rédacteur en chef du magazine Voyages d’Affaires. Brushing et tailleur façon Sue Ellen dans Dallas, un accent à couper au couteau, une énergie et un optimisme très « américains », bref une sacrée business woman !

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Hôtels : quelles stratégies d’achat ?

Après avoir gelé les contrats hôteliers le temps du Covid, les acheteurs reviennent à un monde plus normal, mais avec des tendances affirmées.

Comme chaque année, dans le cadre du supplément « Hotel Report », le journal Business Travel News a interrogé 138 acheteurs sur l’état et l’avenir de leurs programmes hôteliers. Les entreprises ainsi sondées sont certes très anglo-saxonnes mais les enseignements sont intéressants de ce côté-ci de l’Atlantique.

Les résultats de l’enquête montrent d’abord qu’un acheteur sur quatre a prévu de lancer un appel d’offres complet en 2022 alors qu’un sur cinq reconduira l’ensemble de son portefeuille. Les autres reconduisant des parties seulement du programme. Des chiffres qui n’étonnent pas Louise Miller, directrice associée d’Areka Consulting, citée par BTN : « Certains clients sont à 40 ou 50% des niveaux antérieurs à la pandémie, ils savent où ils séjournent, où ils vont, et peuvent se sentir à l’aise pour négocier ». Avant d’ajouter : « D’autres voyagent à 10% des volumes précédents, ils attendent de voir où va se matérialiser la demande et peuvent pratiquer une gestion dynamique des programmes hôteliers ». 

En effet, 62% des acheteurs ont déclaré qu’ils pousseront davantage les tarifs dynamiques (assorti pour 44% d’un tarif négocié comme plafond) alors que 22% prévoient de se concentrer plus sur les tarifs fixes. 

Autre enseignement : BTN rapporte que certaines sources ont noté que les programmes hôteliers étaient plus petits qu’avant la pandémie. Ann Dery, directrice des voyages de Standard & Poor’s, confirme : « Ma stratégie est d’avoir un programme plus stratégique. Nous n’avons pas besoin de 200 hôtels au global ou de plusieurs hôtels dans nos destinations phares. Nous allons nous concentrer sur 25 établissements et nous essaierons d’obtenir pour les 10 premiers un tarif hybride, puis le niveau suivant sera dynamique, avec une remise et un plafond ». 

On retiendra également que 57% des acheteurs interrogés ont indiqué que la réactivité des équipes commerciales et de gestion de comptes des hôtels et des chaînes hôtelières était le plus grand défi auquel ils étaient confrontés. C’est assurément lié aux nombreux licenciements et démissions enregistrés par les établissements hôteliers au plus fort de la crise et aux difficultés qu’ils rencontrent pour réembaucher. On rappelle qu’en France, le secteur de l’hôtellerie-restauration a perdu 237 000 employés entre février 2020 et février 2021 et peine aujourd’hui à recruter. Un vrai souci qui interrogera les travel managers et leurs voyageurs sur la qualité de service dans les semaines et mois qui viennent. 

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

TMC : une pénurie de personnel pour la reprise ?

Après les licenciements et les démissions, le manque de personnel pourrait pénaliser les TMC dans l’accompagnement de la reprise. 

C’est LE sujet qui a animé début octobre les allées du Business Travel Show de Londres, le salon du voyage d’affaires organisé par BTN Group, l’éditeur de Business Travel News. « Alors que les entreprises sortent enfin de leur hibernation post-Covid pour recommencer à voyager, il n’y a pas assez de personnel dans les agences de voyages pour répondre à leurs besoins », constate l’excellent Amon Cohen.

Les témoignages des travel managers interrogés par le journaliste sont édifiants. « Les retards dans les appels téléphoniques et les réponses aux courriels sont un vrai problème depuis que les voyages ont repris début septembre » dit l’un. « Il n’est pas rare que nos voyageurs doivent attendre jusqu’à 40 minutes pour parler à quelqu’un » s’agace un autre. « Notre équipe dédiée a disparu » révèle un troisième. 

Un phénomène qui ne concerne pas seulement les agents de réservation. « Mon account manager a quitté le secteur après avoir été mis au chômage technique » confie Mary qui ajoute, irritée par le manque de concertation : « la nouvelle est très junior et j’aurais préféré quelqu’un de plus expérimenté ». 

C’est d’autant plus préjudiciable qu’organiser un voyage reste très compliqué compte tenu des contraintes sanitaires. Un travel manager rapporte ainsi que le nombre moyen d’appel que ses voyageurs passent à leur TMC pour réserver un déplacement est passé de 3 avant la pandémie à 14 aujourd’hui. Selon la Business Travel Association, qui regroupe les TMC britanniques, le nombre moyen d’appels par réservation est aujourd’hui de 14 à 20 !

S’il se pose avec plus d’acuité alors que sonne l’heure de la reprise, le problème n’est pas nouveau et avait contrarié nombre de travel managers au plus fort de la pandémie. Il faut dire que les TMC, très durement touchées par l’absence de revenus, ont rapidement taillé dans le vif de leurs effectifs. 

Dans un article très intéressant sur la transformation des grandes TMC, le site Skift dresse une liste instructive. Amex GBT est passé de 17000 employés avant la pandémie à 14000 aujourd’hui. Dès avril 2020, Flight Centre Travel Group, qui comprend les marques FCM et Corporate Traveller, a réduit ses effectifs de 6000 personnes. BCD Travel a licencié 3000 de ses 14900 salariés en octobre 2020. Quant à CWT, elle est passée de 17000 à 12000 collaborateurs. Même TripActions avait licencié 300 de ses employés du jour au lendemain, soit 25% de ses effectifs !

Pas étonnant, dans ces conditions, que 28% des acheteurs aient changé de TMC au cours des 12 derniers mois selon un sondage réalisé par le Business Travel Show auprès de 313 travel managers européens, et que 36% prévoient de le faire d’ici l’été prochain. En effet, 52% de ceux qui ont sauté le pas ont expliqué l’avoir fait car leur TMC ne leur avait pas apporté un soutien suffisant pendant la pandémie. Cité par Skift, Scott Davies, le Pdg de ITM (Institute of Travel Management), explique : « Chaque année, entre un quart et un tiers des entreprises lancent des appels d’offres pour changer de TMC, c’est normal. Sauf qu’aujourd’hui, elles cherchent à changer réellement et pas seulement à tester le marché ou faire du benchmarking ! » 

Qu’en est-il spécifiquement en France ? Difficile à dire d’autant que les entreprises ont pu profiter du « quoiqu’il en coûte » de l’Etat. Selon des chiffres non officiels, les agences de voyages (loisirs et affaires confondus) auraient néanmoins perdu 25 à 30% de leurs effectifs et, au 15 septembre dernier, 70% des salariés étaient toujours en chômage partiel ou en APLD selon le syndicat patronal des Entreprises du Voyages (cela a dû évoluer depuis). Des patrons d’agences rencontrés dans les allées du dernier salon IFTM à Paris témoignaient que le recrutement de talents pour accompagner la reprise est l’une de leurs préoccupations majeures. D’autant moins simple quand on n’a aucune visibilité sur les volumes à venir. 

« Quand cette tempête va-t-elle se calmer ? » se demande Amon Cohen en conclusion de son article. « Le consensus est que le problème finira par se résorber, mais dans plusieurs mois et non plusieurs semaines ». D’ici là, selon un travel manager, « les clients devront faire preuve de patience plutôt que demander des pénalités pour le non-respect des SLA (Service Level Agreement) ». Et d’ajouter avec indulgence : « On est conscient de la situation dans laquelle les TMC se trouvent. Si chaque entreprise commençait à vouloir faire respecter son SLA, les TMC en souffriraient encore plus ». Un peu de douceur dans ce monde de brutes…

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Une entreprise sur dix mesure ses émissions CO2

Seules 9 % des entreprises mesurent leurs émissions de CO2 de manière précise, selon une étude réalisée par le BCG.

Peut mieux faire ! C’est le moins qu’on puisse dire après la lecture de la dernière étude du Boston Consulting Group et à quelques jours de la COP26. Sur les 1300 entreprises interrogées par le cabinet (dans 12 pays et 9 secteurs d’activité), plus de 90% ne mesurent pas du tout ou pas correctement leurs émissions de CO2, celles liées à leur activité directe ou leurs activités indirectes comme les déplacements professionnels. 

C’est d’autant plus dommage que 85% d’entre elles cherchent à réduire leurs émissions de CO2 et que seules 11% y sont parvenues à hauteur de leurs ambitions ces 5 dernières années. 

Parmi les obstacles cités par les entreprises interrogées, le manque de temps, d’argent, de moyens, de données, d’incitations. 50% d’entre elles avoue notamment des difficultés dans la collecte de « données granulaires et de facteurs d’émission » qui constitue selon le BCG « la cause première du manque de précision ». L’étude nous apprend ainsi que 86% des sociétés comptabilisent leurs émissions manuellement, via des feuilles de calcul…

Pour le BCG, la solution passe donc par automatisation des processus et par un recours à l’intelligence artificielle. « Nous estimons que l’IA permet de réduire les émissions d’une entreprise jusqu’à 40 % grâce à l’identification des meilleures initiatives, au suivi des résultats et à l’optimisation des opérations de l’entreprise », explique Charlotte Degot, coauteure de l’étude.

La mesure des émissions de CO2 dans le voyage est aujourd’hui l’un des défis majeurs du secteur, notamment dans l’aérien qui constitue 90% des émissions totales d’un déplacement professionnel. En l’absence de standard, personne ne sait trop à quoi correspondent les chiffres donnés par les uns ou les autres. Plus vite l’industrie du voyage s’accordera sur les méthodes de calcul du CO2 des vols et des hôtels, mieux ce sera pour tout le monde et notamment pour les travel managers. 

Le lancement par Google Flights le 6 octobre du calcul de l’empreinte carbone pour l’ensemble des vols du moteur de recherche pourrait servir d’accélérateur. Les données semblent crédibles puisqu’elles s’appuient sur les estimations calculées par l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) à l’aide du modèle d’algorithme le plus récent (2019).

De plus en plus d’entreprises sont demandeuses. Citée par le site The Company Dime, Katharina Navarro, directrice monde des voyages chez Capgemini, exhorte les TMC à aider les voyageurs à guider leurs choix avec des estimations d’émissions de CO2 plus précises qui tiennent compte du type d’avion, du moteur, du type de carburant et même du coefficient de remplissage. Elle a déclaré par ailleurs que Capgemini se lancerait dans un appel d’offres aérien aux termes duquel elle classerait les compagnies en fonction de leurs performances « durables » et pourrait « conclure des accords sur des itinéraires spécifiques ». Elle a ajouté que « l’idée serait d’évaluer l’impact carbone des transporteurs desservant la route et de modifier les volumes en conséquence ». Voilà qui augure de sacrés bouleversements dans les stratégies d’achat…

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

L’hôtellerie manque de personnel

La pénurie de main d’oeuvre dans les métiers de l’hôtellerie-restauration fait craindre une dégradation de la qualité de services. 

Une hémorragie. Près de 120000 salariés de l’hôtellerie-restauration en France ont quitté le secteur depuis le début de la pandémie ! Cette tension n’est pas nouvelle dans ces métiers mais le Covid a démultiplié le problème et cette pénurie de main d’œuvre est qualifiée de « dramatique » par Sébastien Bazin, le patron d’Accor.

Et comme le racontent Les Echos, « la rentrée ne s’annonce pas plus simple que l’été. D’autant qu’en ce mois de septembre, l’activité se montre parfois plus soutenue qu’anticipé, avec, notamment, beaucoup de demandes de dernière minute des clients. Faute d’avoir assez de monde pour tout prendre en charge, notamment des femmes de chambre, certains palaces et grands hôtels n’ouvrent pas quelques étages. Des restaurants de tous types ferment plus de jours qu’auparavant, en particulier en fin de semaine. Un paradoxe alors que la reprise de l’activité était très attendue. »

Par ailleurs, écrit Le Figaro, « on remarque que des employés qui occupaient des postes à l’accueil – « souvent de très bonnes recrues, qui parlent plusieurs langues, et présentent bien », souligne une spécialiste du secteur – ont rejoint la banque ou l’assurance ».

Pour Sébastien Bazin, « le monde a changé, les attentes des collaborateurs aussi. Dans toutes les industries, nombreux sont ceux qui ne veulent plus accepter les sacrifices et contraintes personnelles qui ont été les leurs pendant des années ». Sans compter la question des salaires. La ministre du Travail, Elisabeth Borne, a estimé le 4 septembre sur France Inter que le secteur faisait partie de ceux dans lesquels « les rémunérations ne sont pas à la hauteur ». 

Au début de l’été, toujours dans Les Echos, Didier Chenet, président du groupement patronal de l’hôtellerie-restauration GNI, s’inquiétait : « c’est une véritable catastrophe. Certains hôteliers n’ouvrent pas la totalité de leur établissement faute de personnel. Il y a une crainte aussi sur la qualité de services ». Crainte partagée par d’autres segments du business travel qui ont dû se séparer de nombreux collaborateurs. Au moment où l’on parle davantage de bien-être des voyageurs, les travel managers vont devoir ces prochains mois porter une attention particulière sur ces points. 

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Les OBT sortent-ils renforcés du Covid ?

La reprise espérée du voyage d’affaires donne une occasion aux outils de réservation en ligne de se rendre encore plus indispensables.

Comme pour tous les acteurs de la chaîne de valeur du business travel, le Covid a été un sacré coup d’arrêt pour les outils de réservation en ligne (OBT/SBT). « De nombreuses entreprises ont verrouillé leurs OBT dans le cadre de leur interdiction de voyager ou parce que les outils n’étaient pas à jour de leurs politiques voyages », raconte le consultant basé à Londres Guy Snelgar au media Business Travel News.

Mais les nouvelles règles que mettent en place les entreprises pourraient bien accélérer leur reprise. Parmi ces règles, l’approbation nécessaire ou encore, dans certaines entreprises, l’obligation pour les voyageurs de confirmer qu’ils sont entièrement vaccinés. « Dès que vous avez de nouvelles règles, la technologie devient le meilleur moyen de les faire respecter » avance Guy Snelgar avant de poursuivre : « certaines organisations imposent l’utilisation des OBT parce c’est le moyen garanti de répondre aux obligations du devoir de protection en montrant que vous avez géré les risques de chaque voyage ». 

Sammit Khanndeparkar, le travel manager de l’éditeur universitaire Springer Nature Group, observe par ailleurs que les nombreux licenciements effectués par les TMC depuis mars 2020 nuisent à la fiabilité du service off-line et plaident en faveur de l’utilisation des OBT.

En outre, généralement beaucoup moins chères que les transactions off-line, les transactions on-line seront favorisées par les entreprises, attentives à ce que les coûts restent aussi maîtrisés que possible. Sammit Khanndeparkar estime enfin que le concept bien établi de culpabilité visuelle, selon lequel les voyageurs se sentent obligés de choisir les options les moins chères, fait baisser les prix moyens de 8 à 15%.

Les critiques dont les OBT faisaient l’objet avant la crise n’ont pas disparu pour autant : systèmes vieillissants, pas conviviaux, trop lourds… Un nouveau reproche est apparu ave le Covid selon Kieran Hartwell, patron d’une TMC britannique spécialisée sur les PME : « Les OBT manquent de personnalisation, or les clients veulent être rassurés et il y a un manque de confiance dans les outils en ligne ». Et de préciser : « les voyageurs ont des questions sur les visas, les dérogations aux interdictions de voyager, les vaccinations, les tests… Ils veulent parler à un humain pour avoir des réponses mais je ne sais pas combien de temps cela durera, douze ou dix-huit mois ? » 

Des critiques balayées d’un revers de main par Guy Snelgar (dont il faut préciser qu’il fut par le passé directeur général EMEA de GetThere) pour qui tout ce que les humains peuvent faire pour aider les voyageurs d’affaires à réserver un voyage, les OBT peuvent souvent le faire mieux. S’ils ne le peuvent pas, c’est généralement parce que l’outil de réservation n’a pas été configuré correctement : « Une grande partie des utilisateurs d’OBT n’exploitent pas au maximum leur potentiel de configuration ». Chacun se reconnaîtra… ou pas.

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM