Des classes affaires de moins en moins business

Les produits premium des compagnies aériennes sont plébiscités par les voyageurs loisirs au détriment des voyageurs d’affaires qui ont bien du mal à trouver de la disponibilité. 

Le constat est sans appel : les classes affaires sont désormais majoritairement occupées par des passagers aisés voyageant pour leurs loisirs ou pour motifs personnels. C’est Bruno Trévidic, journaliste aux Echos, qui raconte cette tendance dont les origines remontent à la fin des années 2000.

« La migration forcée des voyageurs d’affaires vers l’arrière de l’appareil avait commencé dès la crise financière de 2008, écrit-il, quand les entreprises avaient entreprise de tailler dans leurs dépenses ». Le Covid a amplifié cette tendance et Air France indique que désormais plus de 50% des passagers en classes affaires voyagent pour leurs loisirs. « La proportion serait encore plus forte en classe premium éco, intermédiaire entre la business et l’éco et qui avait été inventée par Air France en 2008 pour tenter de freiner la migration de la clientèle professionnelle vers l’arrière ». 

Le quotidien économique rappelle l’enjeu de cette clientèle premium : « En moyenne, un passager affaires représente l’équivalent en recettes de trois à cinq passagers éco » (…) alors « qu’un passager de premium éco vaut 1,5 passager éco ». Au final, « chez Air France, ces passagers premium ne représentent que 10% du trafic mais un tiers de son chiffre d’affaires ». 

Aux Etats-Unis, le constat est identique et les acheteurs s’en inquiètent. Ces derniers confirment auprès de Business Travel News la difficulté de trouver des sièges premium et, lorsque qu’ils sont disponibles, «les tarifs sont choquants ». Un acheteur parle même « d’un énorme point de frustration », notant que le service était « négativement affecté », même pour les membres du conseil d’administration et du comité exécutif. 

Si la concurrence avec la clientèle loisirs est la raison de ce manque de disponibilité sur les sièges premium, elle est amplifiée par des délais de réservation des voyageurs d’affaires qui se sont beaucoup raccourci depuis la pandémie. « Il est important de réserver le plus tôt possible » conseille Kyle Mabry, vice-président des ventes mondiales d’American Airlines. 

Une autre raison, plus mystérieuse, serait liée à un problème de contenu délivré par le GDS. United Airlines s’est ainsi rendu compte que des sièges premium n’étaient pas disponibles pour ses clients entreprises car le GDS ne les affichaient pas alors qu’ils étaient effectivement ouverts à la vente ! Sans révéler le nom du GDS incriminé, la compagnie aérienne dit « travailler avec lui pour que l’ensemble du contenu qui lui est fourni soit disponible dans les OBT ». Une étrange affaire que les travel managers doivent garder à l’esprit au cas où la situation se présenterait.

Reste à savoir si cette tendance va se pérenniser. Les experts interrogés par BTN ne sont pas tous d’accord. L’un affirme que « la part des voyageurs loisirs réservant des sièges premium pourrait se tasser surtout si les prix continuent d’augmenter ou si le ralentissement économique se concrétise ». Un autre dit l’inverse : « Une fois qu’ils seront habitués à un produit haut de gamme, ils ne voudront plus revenir en arrière ». Les paris sont ouverts. 

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Une rentrée à hauts risques

Inflation, nuages économiques, chaos aérien, Covid, crise climatique… : après la pause estivale, le retour des voyages d’affaires promet d’être musclé.  

Chaud devant ! Rarement une rentrée n’avait fait face à autant de « vents contraires » comme les appelle Amon Cohen, le chroniqueur vedette de Business Travel News Europe

D’abord, énumère le journaliste, le marasme du transport aérien, faute de personnel. C’est plus de 66 millions de voyageurs qui auront été touchés par les annulations et les retards d’avion entre janvier et juillet en Europe, soit un quart des passagers sur la période selon AirHelp ! 

Les voyageurs d’affaires n’en peuvent plus. Yvonne Moya, directrice mondiale des voyages chez Randstadt, basée aux Pays-Bas, confirme la lassitude des collaborateurs : « A Amsterdam, vous devez être à l’aéroport quatre heures avant le décollage. Nous avons des voyageurs, qui étaient arrivés trois heures avant le départ, qui n’ont pas pu prendre leur vol. Et vous pouvez être presque sûr que vos bagages n’arriveront pas à destination ! »

Hans-Ingo Biehl, directeur exécutif de VDR, l’homologue allemand de l’AFTM, partage cet avis : « Après une mauvaise expérience, certains voyageurs préfèrent désormais ne pas reprendre la route et utiliser la visioconférence. »

La vraie question est : combien de temps cela va-t-il durer ? Certaines compagnies aériennes disent que les perturbations pourraient d’étendre jusqu’au printemps prochain…

L’inflation est une autre menace. La hausse inédite des prix de l’aérien notamment (mais pas que) pourrait bientôt contraindre les entreprises, selon un travel manager danois, « à passer en mode économie avec processus d’approbation plus stricts. »

La crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine représente aussi un danger pour les voyages d’affaires. Les gouvernements européens commencent à être plus fermes sur les économies d’énergie à l’approche de l’hiver. Toujours selon ce même travel manager danois, « cela pourrait amener les entreprises à examiner encore plus attentivement leurs dépenses voyages, à la fois pour faire des économies sonnantes et trébuchantes mais aussi pour économiser du carburant. Même si les gouvernements ne disent pas « volez moins », cela pourrait être implicite. » 

Hans-Igo Biehl est plus catégorique : « En Allemagne, la question est sur la table pour chaque personne, chaque ménage, chaque entreprise. Si le gouvernement nous dit de réduire notre consommation d’énergie, les voyages en feront bien sûr partie. » 

Par ailleurs, l’été anormalement chaud que nous venons de traverser pourrait aussi servir de prise de conscience sur le réchauffement climatique. Yvonne Moya le pense : « Nous avons atteint un sommet, cela va nous amener à nous demander si nous avons vraiment besoin de partir. » Hans-Igo Biehl corrobore : « Plus que jamais, il faudra s’assurer que les entreprises ne voyagent que lorsque cela est justifié. »

Et puis enfin, le Covid n’a pas dit son dernier mot. Comme le dit Pat McDonagh, le patron d’une TMC britannique interrogé par BTN Europe : « Tant que nous n’aurons pas un hiver normal, nous ne pourrons pas dire que cette crise est derrière nous. » Or, en France par exemple, les autorités sanitaires anticipent une huitième vague début octobre.

Au début de l’été, le site The Company Dime avait déjà alerté sur les signes d’un ralentissement du marché du voyage d’affaires aux Etats-Unis.

Première indication : « Après avoir augmenté par à-coups pendant quelques mois, écrivait le journaliste Jay Campbell, le nombre de billets d’avion réservés par les agences de voyages d’affaires américaines s’était stabilisé depuis début avril à environ 70% du volume de 2019 ». 

Deuxième indice : « La moyenne sur 30 jours des réservations d’hôtels effectuées par les clients de Tripbam (un outil de réservation hôtelière) avait atteint en mai 80% de son niveau de 2019 mais était retombée en-dessous de 70% à la mi-juin ». 

Troisième signe : « Un acheteur sur cinq, interrogé en juin par la GBTA, avait déclaré que les inquiétudes liées à l’économie et au risque de récession avaient poussé leur entreprise à interrompre complètement certains voyages d’affaires ».

Les marchés financiers ne s’y étaient pas trompés : un panel d’actions du voyage d’affaires suivi par The Company Dime (dont Amex GBT, Cvent, Expensify…) avait accusé une baisse de 14,5% en juin, soit une chute beaucoup plus forte que le Dow Jones, l’indice boursier de New York, en recul de 6,5% sur la même période. Les raisons invoquées par les investisseurs : le manque de visibilité du secteur du voyage d’affaires et l’ombre de la récession qui plane sur les Etats-Unis. Autant de signes avant-coureurs d’un ralentissement à venir en Europe ?

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Aérien : des négociations impossibles ?

Des prix qui s’envolent, des capacités réduites, des avions pleins : le marché est à l’avantage des compagnies aériennes. Pour les acheteurs, les marges de manœuvre sont bien minces.

Rien ne semble devoir freiner la flambée des tarifs aériens. Relayant des chiffres de Skytra, une filiale d’Airbus, Business Travel News Europe nous apprend que « les tarifs intra-européens en classe affaires réservés pour la période juillet-septembre 2022 sont supérieurs de 33% à ceux de la période équivalente en 2019 ». Sur le transatlantique, la hausse est de 16% en classe affaires sur la même période. Seuls les prix des liaisons entre l’Europe et l’Asie restent en-deçà des niveaux de 2019. 

Interrogée par le journaliste, Aurélie Duprez, associée fondatrice d’Areka Consulting, confirme une situation tendue : « Nous disons à nos clients qu’ils peuvent s’attendre à ce que le prix moyen de leur billet augmente de 20 à 30% cette année ». D’autres estimations évoquent même des hausses de 40%…

Malgré la reprise des voyages, les entreprises n’ont pas retrouvé des volumes comparables à ceux de 2019 et sont donc moins attractives lorsqu’elles arrivent à la table des négociations. C’est la mécanique habituelle, la baisse des volumes de voyages réduit le pouvoir d’achat. Un travel manager d’une grande entreprise témoigne : « Certaines compagnies aériennes nous accordent des niveaux de remise qu’elles appliquaient auparavant aux petites et moyennes entreprises, soit une réduction standard de 5%. » 

Richard Jonhson, senior director de CWT Solutions Group, en rajoute une couche dans The Company Dime : « Il n’y a que les intransigeants ou les naïfs qui pensent qu’ils vont obtenir les mêmes remises qu’avant, soyons réalistes ! » Au mieux, certaines entreprises peuvent obtenir en compensation des avantages comme l’embarquement prioritaire ou l’accès aux salons, explique Aurélie Duprez, mais ce sera tout.

Dans ces conditions drastiques, faut-il renégocier ses contrats aériens ? Les avis divergent. Christopher Sabby, de CWT Solutions Group, pense qu’il est temps de le faire car les contrats négociés avant la pandémie sont obsolètes : « Nous voyons encore beaucoup de contrats actifs utilisant des données datant de 2016 et 2017 ! » Il suggère donc d’appliquer un mélange de données de 2019 et 2021 et des estimations de volumes projetés. 

Erik Shor, directeur des partenariats de la TMC américaine CTM, recommande l’inverse : « Le conseil que nous donnons est de mettre un frein aux engagements de sourcing. Voyez si vous pouvez obtenir une nouvelle prolongation de vos contrats de six à douze mois. La situation n’est pas propice aux acheteurs, avec des prix moyens de billets d’avion qui atteignent des sommets historiques et des services très perturbés. »

Le journaliste de The Company Dime confirme d’ailleurs « que tout le monde n’est prêt à renégocier. Certains acheteurs veulent d’abord voir comment les changements dans les politiques voyages issus de la pandémie et les comportements des voyageurs affectent les budgets avant de lancer de nouveaux projets de sourcing. » 

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

TMC : transparence exigée

Face aux pénuries de personnel des TMC et à la dégradation du service, les entreprises commencent à s’impatienter et réclament davantage de communication.

Compréhensives… jusqu’à un certain point. Si elles ont fait preuve d’indulgence pendant la pandémie, les entreprises attendent désormais que le niveau de service des TMC redevienne identique à ce qu’il était avant le Covid. Mais c’est loin d’être le cas. La faute à une pénurie durable de personnel dans l’ensemble du secteur du voyage (pas seulement dans les TMC) et à une reprise de l’activité plus forte que prévu.

Une situation qui concerne tous les marchés. Clive Wratten, le président de la Business Travel Association, qui rassemble 90% des TMC britanniques, estimait récemment dans BTN Europe que le nombre de salariés des TMC est inférieur de 20% à celui d’avant la pandémie. Un chiffre similaire dans les agences de voyages françaises selon Valérie Boned, la secrétaire générale des Entreprises du Voyage (EdV). Aux Etats-Unis, ce serait encore pire. 

Résultat : les relations entre les TMC et leurs clients se tendent bigrement. Rien de plus inconfortable en effet pour un acheteur ou un travel manager de se retrouver coincé entre une TMC défaillante et un voyageur mécontent du service proposé, explique dans Business Travel Mag Kerry Douglas, l’un des responsables d’ITM, l’équivalent britannique de l’AFTM. Et de poursuivre : « Les acheteurs ont la tâche difficile d’expliquer à leurs voyageurs que la pénurie de personnel touche l’ensemble du secteur et que l’expérience voyage en 2022 restera très différente de celle de 2019 ». 

Certains travel managers affirment même que, frustrés par les temps d’attente lorsqu’ils appellent la TMC, leurs voyageurs réservent désormais directement auprès des fournisseurs, ce qui génère des problèmes de conformité et de duty of care. 

D’autres, et c’est le cas aussi en France, n’hésitent plus à lancer des appels d’offres pour changer de TMC. Sauf que la pénurie étant générale, il est peu probable que le changement de TMC améliore la situation.

Aux Etats-Unis, la tension est montée d’un cran fin juin lors de la publication dans The Company Dime d’une tribune de Brad Seitz, un vétéran du secteur. Travel manager de la société Pro Unlimited, il se disait très agacé par l’attitude des fournisseurs, et particulièrement des TMC, qui rejettent la responsabilité sur les entreprises qui n’auraient pas été capables d’anticiper la reprise des voyages. « Comme si nous avions une boule cristal ! » tonne-t-il. 

« En discutant avec mes collègues travel managers, j’ai appris que les carences de services se produisent même lorsque les clients ont donné à leur TMC une idée précise de leurs plans de retour au voyage » affirme-t-il. 

Courroucé pour le moins, Brad Seitz avertit : « Les travel managers et les acheteurs sont des éléphants. Nous n’oublions pas. Pour toutes ces TMC qui nous disent que c’est notre faute, rappelez-vous-en. Et sachez que nous aimons parler entre nous de nos expériences ». La menace est à peine voilée. 

La missive fait tellement de bruit que Nick Vournakis, le vice-président de CWT, prend la plume cinq jours plus tard pour répondre point par point aux critiques de Brad Seitz et appeler les acheteurs et les fournisseurs à travailler ensemble. 

En Grande-Bretagne, les acheteurs ne sont pas en reste. Par la voix d’ITM, ils exhortent les TMC à faire preuve d’une plus grande transparence au sujet de leur manque de personnel et de leurs problèmes opérationnels, trop entourés selon eux d’opacité. « Communiquez avec nous, ouvertement et honnêtement. (…) Arrêtez de nous dire à quel point vous êtes formidables et soyez honnêtes avec vos problèmes », s’enflammait Brad Seitz dans The Company Dime.

Une chose est sûre : il va falloir prendre son mal en patience car les TMC n’ont pas de solution à court terme pour endiguer rapidement cette pénurie de collaborateurs. Ou alors en profiter pour revoir le modèle de rémunération de sa TMC car les acheteurs britanniques qui travaillent avec leur TMC sur la base de frais de gestion (et non de transaction) ont, disent-ils, été moins affectés par les problèmes de service…

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

NDC : un flop qui coûte cher

Dix ans après son introduction, NDC ne représente qu’une goutte d’eau des réservations et commence à coûter très cher aux compagnies aériennes. 

Le chiffre est terrible, sans appel. Au cours d’une conférence de presse téléphonique à laquelle a participé The Company Dime, Yanik Hoyles, directeur de la distribution de IATA, a révélé que NDC ne représentait à la fin du premier trimestre 2022 que 10% de la distribution indirecte des compagnies aériennes, donc des réservations réalisées en dehors de leurs propres sites web. 

Et encore, 95% de ces 10% ne concernent que des voyages loisirs puisque ces réservations sont faites sur des sites web grand public. Résultat : seulement… 0,5% des réservations indirectes se rapporte au voyage d’affaires. Autrement dit, 1 réservation indirecte sur 200 utilise NDC pour un déplacement professionnel comme le titre The Company Dime ! Dix ans après avoir été introduit par IATA, le bilan de NDC est donc famélique, pour l’instant tout au moins.

Très, très loin en tous cas des dernières estimations de IATA datant de 2018 qui prévoyaient 20% de pénétration NDC en 2020 et 50% en 2023 !

En cause selon Yanik Hoyles, la complexité du voyage d’affaires (quelle découverte !), l’impact de la pandémie, mais aussi la lenteur d’adoption des GDS et des OBT/SBT. Habituel jeu de rôle qui voit depuis des années les compagnies aériennes et les GDS se renvoyer la responsabilité du fiasco NDC.

Dans cet interminable et gaguesque feuilleton NDC, on n’est peut-être pas au bout de nos surprises. Le même article de The Company Dime fait référence à une étude réalisée par T2RL Travel Technology Research et publiée en juin, qui qualifie d’inquiétants les coûts de développement de NDC pour les compagnies aériennes. Et de préciser : « ces coûts deviennent un facteur qui ajoutent à la lenteur du déploiement ». 

Pour les compagnies aériennes en effet, « les budgets restent très serrés en raison des conditions du marché et, sans un retour sur investissement clair, les projets informatiques ont du mal à trouver des ressources et un soutien interne », selon le cabinet de conseil en technologie. 

Problème : dans ce retour sur investissement, il faudra tenir compte des incitations financières que les compagnies décideront d’offrir aux TMC pour qu’elles adoptent la norme NDC. Si les compagnies restent discrètes, pour ne pas dire secrètes, sur ces incitations, Kyle Moore, directeur de la stratégie client chez Travelport, révélait dans une interview en début d’année « qu’il existe bien des accords (entre compagnies et TMC) mais qu’ils ne sont tout simplement pas publics ». Oui décidément, concernant NDC, on n’est certainement pas au bout de nos surprises. 

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Hôtels : gare aux accords de chaînes !

Dans certains cas, les accords signés avec une chaîne hôtelière entraînent des coûts supplémentaires et diminuent le pouvoir d’achat des acheteurs. 

Une mise en garde utile et salvatrice. Pauline Robin, senior director de Roomlt CWT, a récemment publié une tribune dans The Company Dime sur un des points faibles mais récurrents de certains programmes hôteliers : les accords de chaîne. 

Rappelons d’abord un principe de base des programmes hôtels : les acheteurs négocient généralement avec des établissements individuels et stratégiques sur des marchés clés où les voyageurs de l’entreprise se rendent régulièrement et fréquemment. Ces hôtels proposent des tarifs et des équipements compétitifs en échange de parts de marché et de volumes importants. 

S’y ajoutent des accords portant sur l’ensemble d’une chaîne hôtelière afin de couvrir géographiquement les endroits où aucun établissement privilégié n’a été négocié. Première fragilité : censées combler des besoins secondaires, ces négociations sont souvent gérées de façon moins stratégique alors que la sélection des établissements individuels préférés est étudiée avec soin. Résultat : l’entreprise empile un trop grand nombre de chaînes hôtelières dans son programme. 

Pauline Robin s’est concentrée sur un échantillon de 25 entreprises clientes de CWT Roomlt dont les dépenses hôtelières s’élèvent en moyenne à 35 millions de US$ par an. Elle a compté une moyenne de six accords de chaîne par client et un maximum de 15 ! Sachant que ces entreprises négocient environ 200 établissements préférés pour l’année, et qu’un accord de chaîne peut ajouter des milliers d’hôtels, le portefeuille total devient vite impressionnant. 

Mais surtout, là où le bât blesse, ces chaînes comprennent inévitablement des hôtels situés aux mêmes endroits que les établissements préférés, créant ainsi une concurrence de fait en volume et en part de marché. 

Sur les 25 programmes hôteliers étudiés, 67% des dépenses de chaînes effectuées au premier trimestre 2022 l’ont été sur des marchés où l’entreprise disposait déjà d’hôtels individuels préférés. Ces derniers ont vu donc leur échapper 21% du volume total dépensé dans leur périmètre. Non seulement l’entreprise perd ainsi en pouvoir de négociation mais la nuit en « hôtel de chaîne » coûte 10,50 US$ de plus que celle en hôtel préféré. 

Ces accords de chaîne valent-ils au moins la peine là où l’entreprise n’a pas d’accord avec un établissement préféré ? Même pas ! L’économie moyenne par nuit est de 0,40 US$ par rapport aux tarifs du marché. Insignifiant ! 

Au final, Pauline Robin recommande notamment de ne pas avoir plus de deux contrats de chaîne, avec des relations solides et des contrats serrés négociés autour de la couverture requise. A bon entendeur !

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

Travel manager : un rôle plus stratégique

A la faveur du Covid, la fonction a pris de l’épaisseur et pourrait davantage s’imposer encore dans l’entreprise si le travel manager active les bons leviers. 

 Une occasion en or qui ne se présente qu’une fois par génération ! C’est ainsi que Business Travel News Europe introduit l’opportunité qui se présente aux travel managers de « devenir des super-héros de la stratégie. » Une conclusion qui s’appuie sur les échanges qui ont eu lieu lors d’ateliers organisés dernièrement (et indépendamment les uns des autres) par deux associations européennes : L’Institute of Travel Management (ITM) au Royaume-Uni et l’Association of Swiss Travel Management (ASTM).

Les deux ateliers ont évidemment insisté en préambule sur le rôle du Covid qui a permis aux travel managers « de se faire connaître davantage auprès des parties prenantes de l’entreprise », et à ces dernières de regarder désormais avec plus d’intérêt le programme voyages. 

Lotten Fowler, directrice générale de l’association suédoise des voyages d’affaires, est d’accord : « La visibilité des travel managers a augmenté de façon spectaculaire (…). Sécurité : nous devons parler au travel manager. Durabilité : nous devons parler au travel manager. L’équilibre entre vie professionnelle et vie privée : nous devons à nouveau parler au travel manager. »

L’ITM voit pour les travel managers les opportunités se déployer autour de deux axes. Le premier est une approche plus stratégique des voyages après que « de nombreux programmes de voyages ont été mesurés par le coût principalement, sans discussion sur la valeur d’un voyage et le retour sur investissement. »  Et d’ajouter : « de nombreuses entreprises peuvent encore croire que les équipes voyages sont là pour résoudre le « comment » et non le « pourquoi », or le travel manager a désormais acquis une valeur et une expertise sur la question. 

Le deuxième est l’élargissement des compétences du travel manager, au-delà de la fonction voyages. Compétences qui peuvent être utiles à d’autres au sein de l’entreprise. « Si un autre département organise des sessions de formation pour son personnel sur la gestion des conflits ou l’engagement des parties prenantes », le travel manager y a tout à fait sa place pour partager son expérience et donner des conseils. 

De son côté, l’ASTM insiste sur la nécessité pour les travel managers d’améliorer leur communication auprès des parties prenantes internes. « Il est important de faire beaucoup d’auto-marketing au sein de votre entreprise, explique Dominic Short, le président de l’association, il faut parler de la valeur que vous apportez et le répéter sans cesse. »

Selon l’ITM, de nombreuses entreprises forment aujourd’hui des groupes de travail interdisciplinaires pour s’attaquer aux grandes questions qui les agitent en ce moment, et « le travel manager doit avoir un siège dans chacun d’eux », quitte à s’imposer.

L’association britannique pointe toutefois un risque, celui d’être trop absorbé par les défis logistiques du moment (chaos aérien, pénurie de personnel dans les TMC…), trop enfermé dans l’opérationnel. « Le défi consiste à essayer de créer l’espace nécessaire pour un rôle plus stratégique. » A vous de jouer ! 

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

La carte Liberté s’enrichit

Bénéficiez de nouveaux avantages exclusifs

VOYAGEURS PROS, BÉNÉFICIEZ DE 2 TARIFS (1) EXCLUSIFS POUR VOS VOYAGES EN TRAIN GRÂCE À LA CARTE LIBERTÉ !

Depuis le 15 juin 2022, TGV-INTERCITÉS a enrichit les avantages de la carte Liberté pour s’adapter aux nouveaux comportements de voyage. C’est l’opportunité pour vous de développer votre marque employeur et la fidélisation de vos collaborateurs. Si vous ou vos collaborateurs souhaitez voyager en solo ou accompagnés, en semaine ou le week-end, il y aura toujours un tarif adapté avec la Carte Liberté !

Les tarifs Pro et tarifs Avantage ne sont pas cumulables sur une même réservation (1) . 

(1) Les 2 tarifs offerts par la carte Liberté ; Liberté et Avantage, ne sont pas cumulables pour une même réservation. L’encarté ne peut faire profiter ses accompagnateurs (adulte et enfant(s)) des bénéfices du tarif Avantage s’il choisit le tarif Liberté. En cas de voyage aller-retour sur une même réservation, le tarif doit être strictement identique à l’aller et au retour.

CWT : que vaut son nouvel abonnement ?

La TMC vient de lancer un nouveau modèle de tarification par abonnement après l’avoir expérimenté pendant un an avec des clients pilotes. 

On peut prendre le problème par tous les bouts, la conclusion sera toujours la même : avec un modèle de tarification basé sur les frais de transaction, le risque pèse trop lourdement sur la TMC. Comme l’a illustré le Covid, en cas de perturbation exceptionnelle, les revenus disparaissent et les TMC sont contraintes de licencier rapidement et massivement pour éviter des pertes financières catastrophiques.

Pour mieux répartir le risque, CWT a donc imaginé un abonnement, soit un tarif mensuel qui couvre tous les produits et services fournis par la TMC, en fonction du volume de transaction prévu, comme le rapporte Business Travel News. Ce tarif mensuel peut être révisé à la hausse ou à la baisse si l’entreprise a besoin d’ajouter ou de soustraire des services, ou d’ajuster les prévisions de volume. 

Cité par The Company Dime, Brady Jensen, vice-président finances et responsable de la tarification mondiale de CWT, met en avant la simplification du système : « Ce nouveau modèle de facturation n’émet qu’une seule facture mensuelle simple et complète, au lieu de plusieurs, ce qui facilite considérablement le suivi et la gestion des dépenses ». Autre avantage selon Brady Jensen : « Les clients pourraient faire des économies grâce à des remises sur le volume que l’on ne trouve pas habituellement dans le modèle courant des frais de transaction ». 

Interrogés par The Company Dime, les consultants Will Tate et Andrew Menkes confirment qu’une telle simplification pourrait bien séduire les petites et moyennes entreprises. « Le modèle semble être idéal pour toutes les organisations qui ont des ressources internes limitées pour gérer les voyages et qui sont relativement satisfaites des niveaux de service qu’elles obtiennent ». 

Ils sont en revanche plus réservés pour les grands comptes : « Ce que les clients peuvent gagner en simplification grâce à une approche groupée, ils le perdent en transparence ». Avec d’abord une première interrogation : dès lors qu’il n’y a plus de facturation automatique au centre de coûts du voyageur, comment l’entreprise peut-elle répartir le coût entre les services ? 

Mais surtout, ce sont les revenus fournisseurs qui sont dans leur viseur. Car les TMC tirent de leurs fournisseurs une partie importante de leurs revenus : CWT avait estimé en 2021 que ces derniers représenteraient 40% de ses revenus en 2022. « Si la nouvelle tarification tient compte du coût du service pour le client et des revenus générés par les fournisseurs, alors le modèle d’abonnement pourrait fonctionner à condition bien sûr qu’il y ait transparence ». Mais est-ce le cas ?

C’est un point sensible car dans le système traditionnel à la transaction, certains clients négocient avec la TMC le retour d’une partie ou de la totalité des commissions reçues par cette dernière. C’est le cas notamment quand l’entreprise négocie directement ses contrats avec les fournisseurs aériens notamment.

Brady Jensen a reconnu dans Business Travel News que la nouvelle tarification « ne convient pas parfaitement à tous les clients ». Mais il faut aussi prendre garde à la distinction américaine entre grands comptes et PME qui n’est pas tout à fait la même qu’en Europe et en France. Parmi les entreprises pilotes, on trouve en effet ServiceNow, une société mondiale de logiciels comprenant 19200 salariés (tout de même !), qui par l’intermédiaire de sa directrice voyages s’est dit satisfaite de cette tarification à l’abonnement. 

Il convient aussi de préciser que ce nouveau système n’a aucun caractère obligatoire. CWT le propose et c’est l’entreprise qui décide. Le chemin s’annonce donc encore long pour un changement de modèle économique d’autant que les entreprises n’y semblent pas encore particulièrement disposées. Selon une étude menée par The Beat, une publication du groupe BTN, plus de 80% des acheteurs rémunèrent leur TMC à la transaction. On part de loin. 

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM